Together
15 février 2025 0 Par Paul RassatQuand together devient TögEthér® dans le regard acéré de Barbara Cassin. Dans son Archipel des idées, elle écrit à propos de ce logo choisi par l’Europe : …ce mot appartient « au globish, cet anglais sans auteur et sans œuvre…Les autres langues…interviennent comme des fautes d’orthographe, des parasites de la langue unique. Le muticulturel est réduit à une série d’erreurs et d’écarts, fioritures fautives par rapport à la norme globale.
Les couleurs et les formes veulent évoquer le multiple – une lettre taggée, une marque de biscuit, un centre bleu-blanc-rouge. Elles évoquent d’abord le logo de Google, en un peu moins ingénu, mais en beaucoup plus visiblement impliqué dans la marchandisation mondiale. L’Europe est l’enseigne d’une boutique, avec « since 1957 » pour enfoncer le clou ; on y adhère comme à une marque déposée, registrated, avec son petit r dans le rond respectueux du droit des marques-tellement tendance…Comme si sa définition était déjà toute faite, immuable, et que la firme doive simplement grossir en franchisant. »
Franchise ?
Ambiguïté du mot « franchise » qui est à la fois une forme d’honnêteté et un contrat commercial. Oxymore ? Avec la Grande Bretagne, aucune de ces définitions n’a fonctionné. Ça n’a pas réussi. Réussir vient de l’italien riuscire, sortir de nouveau, qui vient du latin exire, sortir. Le brexit a été une sortie, mais pas une réussite. Il s’est construit sur le mensonge et la manipulation de l’opinion et non sur la franchise. La franchise européenne en a souffert et subit depuis les assauts de la Russie, de la Chine et des États-Unis d’Amérique. Ensemble, en revanche, les pays européens formeraient une puissance remarquable. Ensemble, together, insieme, juntos…dans toutes les langues.
Littéralement, riuscire pourrait signifier renaître. Or le mouvement Renaissance n’est pas une réussite. Peut-être faudrait-il nommer à la tête de l’Europe un « réussisseur » ( ou une réussisseuse), hapax inventé par Victor Hugo. Et oublier le « rateur », autre hapax, mais de Verlaine celui-ci.