Un sacré trio en partance pour le lac Titicaca
18 avril 2021Des Péruviens à Annecy
Drôle d’image ce vendredi 16 avril à Sevrier. On y croise un jeune homme coiffé d’un bonnet péruvien. C’est qu’il faut s’adapter ! En novembre 21, un trio compte traverser le lac Titicaca à la nage. Alors on se met dans l’ambiance.
Théo Curin
Théo Curin est l’instigateur de cette aventure. Amputé des quatre membres, détenteur de nombreuses médailles en natation malgré son très jeune âge, Théo est en délicatesse avec les catégories dans lesquelles on enferme les handicapés qui font de la compétition. Ses prochains J.O tombent à l’eau. Autant quitter un temps les lignes d’eau tracées en milieu fermé et aller glaner l’aventure. La vraie.
Au-delà des chiffres
Notre société aime les chiffres. Ils tiennent lieu de repères, rassurent ou effrayent, c’est selon. Le lac Titicaca ? 3800 mètres d’altitude. 122 kilomètres de long. Une dizaine de jours de traversée en tractant un radeau de 200 kilos environ. On pourrait même s’amuser à diviser la longueur du Titicaca par 50 mètres, la longueur sur laquelle Malia Metella a été médaillée d’argent aux J.O. Ça donne 2440. Multiplié par pi, vous obtenez l’âge du capitaine.
Une équipe
Le troisième élément du trio est Matthieu Witvoet, coutumier des exploits décalés. C’est lui qui en ce matin d’avril porte le bonnet péruvien. L’équipe est sur le lac d’Annecy depuis cinq jours. Elle y retrouve, à une autre échelle, les conditions du Titicaca et se rôde à la vie sur un radeau. On se réveille, s’étire (chacun à sa façon). La nuit n’a pas été facile. On a mal dormi et il va falloir effectuer une heure de nage chacun, à tour de rôle, en tractant le radeau. La petite tente qu’il porte, déchirée, a été rafistolée par une voisine. Système D et bonne volonté. Alors qu’on nous bassine avec ces mots en général hors sol, empathie, bienveillance, amitié prennent ici tout leur sens. Car sinon comment supporter cette promiscuité, ces épreuves ?
Donner du sens
Parmi les poncifs de notre époque, l’expression « donner du sens » figure en bonne place. Au cœur de ce trio, l’humour gentiment provocateur fait pétiller la fraîcheur du matin. « Pas d’bras, pas d’chocolat », c’est pour le cinéma. Avec Théo c’est plutôt « Pas d’bras, vive le lac Titicaca ! » Vive l’aventure sportive et humaine à dimension écologique. Vive la rencontre des autres.
En les apercevant, j’ai cru découvrir un radeau de migrants échoué sur la rive d’un lac autour duquel on vit plutôt bien, un peu à l’abri des autres et de leurs problèmes. Je m’étais demandé pourquoi ce temps d’acclimatation à Annecy. Un radeau de fortune, un trio d’amis, un océan d’aventure humaine. Finalement, un radeau de ce type en plein mois d’août sur le lac d’Annecy serait bien plus exotique que sur le Titicaca.