Détracteurs

— Les paysans ont des détracteurs.

— Tu bégayes maintenant ?

—  Pourquoi ?

— Tu dis «  Les paysans ont des détracteurs au lieu de dire : « Les paysans ont des tracteurs. »

— Si je bégayais, je dirais «  Les pépé, les paysans ont des détracteurs ». Je veux simplement dire que les paysans sont critiqués par des détracteurs. On dénonce les pesticides, la production intensive, les animaux maltraités. Les paysans sont présentés comme nuisibles alors qu’ils sont indispensables.

— Oui, mais ils ont aussi des tracteurs.

— Qui ne plaisent pas forcément à leurs détracteurs qui préféreraient voir des chevaux de trait dans les champs. C’est plus écolo.

— Les détracteurs déconstruiraient volontiers les paysans. On est à l’époque du dé, du dé à coudre, à découdre, à en découdre. Un ministre du commerce parlait même de dévendre parce qu’on vend trop.

— Alors qu’on ferait mieux de se défendre contre les attaques de tous bords. Tu sais d’où vient le mot tracteur ?

— Non.

— Du latin « trahere ».

— Et ?

— Et «  trahere » veut aussi bien dire «  tirer derrière soi » que « tirer à soi ». On peut tirer dans les deux sens ! Les paysans tirent avec des tracteurs, les dictateurs avec des canons, des missiles et les politiques tirent des casseroles.

— Ils les traînent. Ça doit être pour ça qu’on parle de cuisine politique.

— Alors que la bonne cuisine dépend des bons produits élevés par les agriculteurs grâce à leurs tracteurs que dénoncent les détracteurs.

— De quelles marques, les tracteurs ?

— PS, PC, RN, Républicains, Verts, Insoumis, au choix.

— T’as déjà labouré avec un Vert ?

— Non, mais ils envisagent de délabourer. Il est prouvé que le labour abîme la terre et détruit la biodiversité.

— On est vraiment l’époque du dé.

— Peut-être, mais comme disait Mallarmé : «  Un coup de dés jamais n’abolira le hasard. »