Différence

Différence

21 septembre 2025 0 Par Paul Rassat

« Du pareil au même. Chercher la différence » écrivait Denis Guedj dans un livre au titre évocateur La gratuité ne vaut plus rien. On sait depuis que si c’est gratuit c’est vous le produit.

Denis Guedj était mathématicien. Il poursuit : «  Dans la légalité moderne de la société mathématique, la définition constitue la naissance officielle d’un être. Avant elle, on  oublie souvent de le rappeler, il y a l’intuition qu’on a eue de l’objet et par qui tout a commencé. »

Afin de pousser toujours davantage la précision de la définition, les mathématiques ont trouvé différentes façons de dire « le même ». L’égalité, l’équivalence, la similitude, l’identité…Les mathématiques ont bâti des séries d’iso et d’équi qui sont devenues équitable, commerce équitable.

Cependant deux entités égales, équivalentes, semblables demeurent deux entités distinctes. Et Denis Guedj poursuit : «  Parfois, en désignant les différences, on produit de la similitude. Combien de fois dans l’Histoire, l’autre, l’étranger, le différent a-t-il servi à produire de la similitude ? Le différent-exhibé à cette fin-…nous fait nous voir comme semblables, eu égard à la distance qui nous sépare de lui.. Il apparaît ; on resserre les rangs ! S’il n’était pas là, il faudrait l’inventer. Souvent, on l’invente. »

Mais revenons à l’égalité. Denis Guedj écrit :  « Pour l’égalité, chaque objet est le seul à avoir le même rôle que lui-même. Voilà pourquoi il se retrouve seul dans sa classe d’équivalence. Solitude de l’égalité, qui est la solitude de l’identité… »

On se souvient de Jean-Luc Mélenchon hurlant : «  La République c’est moi ! » Cette affirmation véhémente pose question et demande réflexion. Relève-t-elle de l’égalité, de l’identité ? Des deux ? La République se réduit-elle à Jean-Luc ? On aurait ici une superbe contrepèterie politique. Toute la République se concentrerait-elle en la personne de l’élu ? Ou bien n’en serait-il qu’une flammèche comme les apôtres furent celles de l’Esprit Saint ?

  Le  Don Juan de Molière , déclare, « Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit. » Est-ce la même chose de dire «  deux et deux sont quatre » ou bien « deux et deux égale quatre », ou encore « deux et deux font quatre ». Contacté sur cette question existentielle, Cédric Villani avait élégamment et philosophiquement botté en touche.

Ainsi tout se joue dans l’écart, éventuellement grand des gymnastes ou des danseuses. La question se pose de la même façon ( même, identique, semblable ?) en matière de langue. Deux synonymes n’ont pas le « même » sens mais des sens très voisins, à un écart près. C’est ainsi qu’on peut passer insensiblement de prendre à saisir, puis à recevoir, accepter, accorder, offrir, et enfin à donner. Deux et deux font quatre et prendre c’est donner. Je est un autre et je suis-moi-même.