Faire !

Faire !

6 novembre 2025 0 Par Paul Rassat

Faire signifie à l’origine « poser, placer, mettre » Le facere latin était « faire, accomplir, produire, agir, se comporter. Facile, c’est qu’on fait aisément. Et ce qui est fait est fait et devient un fait. Dans À mots découverts, Alain Rey n’aborde pas directement le verbe faire, mais dans des expressions : faire chanter, faire des misères, faire exception, faire justice, faire la navette. Faire ne s’emploierait-il pas absolument ? Seul ? Si ; «  Il a fait » = il a fait ses besoins. Pire «  Il a fait sous lui. » Ceci devient un fait divers si vous n’êtes pas directement concerné.

Faire en conscience est une démarche poétique. C’est ce que nous dit l’étymologie retransmise par Andrea Marcolongo. Fabriquer  exige une maîtrise technique et une transformation matérielle.

Faire n’importe comment

Récemment, sur les zondes publiques, une animatrice disait : «  Quand j’ai fait prof. » On soulignera l’apocope. « Professeur » eût été trop long à prononcer. L’expression souligne l’écart entre «  faire «  et «  être ». Le second implique d’incarner pleinement ; le premier est un simple emploi. Avec ou sans poésie ?

Faire en sorte

Sur les mêmes zondes, un élu du RN , au discours pourtant très incisif, avait plusieurs fois recours à l’expression «  faire en sorte ». Il était suivi à la mi-journée par un dirigeant du PS utilisant la même formule : faire en sorte. Ne nous détacherions-nous pas de la réalité ? De toute réalité ? Jules César disait déjà et écrivait ( ou faisait écrire), «  J’ai fait un pont, j’ai fait des fortifications… » Que nenni Jules ! Ce sont vos soldats, vos armées qui faisaient. Vous, vous donniez les ordres. Cette tendance s’amplifie de nos jours. Les robots font pour nous. L’IA cherche et répond pour nous. L’avantage, avec les robots, c’est qu’ils ne font pas sous eux. Peut-être finiront-ils par faire sans nous. Et puis il y a les algorithmes qui contribuent à nous faire. Nos élus qui ne savent plus faire, s’ils l’ont su.

Atermoyer

L’évolution de notre langue traduit cette tendance de plus en plus marquée à atermoyer, à différer dans le temps et dans notre relation à la réalité ( qu’on nous demande toujours de voir en [Sainte] face). Un peu perdus en rase campagne électorale, nos dirigeants font en sorte d’être en capacité de pouvoir se poser la question de savoir si.

PS

Reste  » faire la peau », expression illustrée par cette photo très libre des tanneries de Fès. Et le terrible emploi du verbe faire dans une expression de ce genre :  » Elle s’est fait violer ». Comme si elle avait aidé à la manœuvre. Ça l’fait pas.