Fer à cheval

Fer à cheval

3 septembre 2025 0 Par Paul Rassat

— Un fer à cheval ? À cheval sur quoi ?

— Pas à cheval sur quelque chose ; on dit «  fer à cheval » mais c’est un fer pour un cheval.

— Si c’est pour, pourquoi on dit « à » ?

— C’est un «  à » de destination, d’usage. Comme la tasse à café, la pince à sucre.

— On dit bien « la sardine à l’huile » et la sardine n’est pas vraiment destinée à l’huile. Elle est dedans. Si l’huile est d’olive première pression à froid, c’est préférable. Certains collectionnent même les boîtes de sardines à l’huile. Elles se bonifient avec le temps ; comme les grands vins.

— Le fer à cheval, lui, n’est pas dans le cheval, il est fixé sous ses sabots par un maréchal-ferrant qui ferre le cheval.

— Comme un poisson ?

— Non, le cheval est bien trop lourd.

— Le fer à cheval a quelque chose à voir avec l’idée d’être à cheval sur quelque chose ? Sur le règlement, par exemple ?

— Chais pas vraiment, mais quand le cheval est ferré, il est vraiment à cheval sur ses fers. Le maréchal-ferrant les lui cloue dans les sabots.

— Mais pourquoi ?

— Les fers à cheval sont pour le cheval l’équivalent des chaussures pour les humains.

— Personne ne me cloue mes chaussures sous les pieds !

— C’est une image. Les fers et les chaussures sont une protection. L’avantage des chaussures, c’est qu’on peut en changer. De sport, de ville, de randonnée, de montagne.

— Alors que le cheval porte toujours les mêmes fers.

— Ils lui permettent d’avoir de meilleurs appuis au sol.

— Je viens de comprendre un truc. Les hommes prétendent avoir un sens de la réalité plus développé que celui des femmes. Ils ont davantage les pieds sur terre parce que les femmes portent des chaussures à talons hauts. Tu vois des juments avec des fers à talons hauts ?

— Tu dis n’importe quoi.

— Non, je suis très à cheval sur les mots et sur le sens des mots.

— Si on parlait d’autre chose ?

— Tu disais que le fer à cheval est un fer d’usage. Donc il s’use.

— Et on le remplace quand il est usé. C’est le métier du maréchal-ferrant.

— D’accord, mais l’usure est interdite. Il est interdit de prêter de l’argent à un taux d’usurier.

— Ça n’a rien à voir. Il y a usure et usure.

— Comme il y a « à » et « à ». Le à d’usage, le à de lieu, le à d’attribution et plein d’autres à.

— C’est pour ça qu’il faut être à cheval sur le sens des mots, et, tu as raison, il est préférable que les mots soient bien ferrés, car ils s’usent.

— Surtout si l’on s’en sert.

— Tiens, si on parlait de vin.

—  D’accord, mais avec modération.