Gérer
19 octobre 2025« Deux femmes dans un café parlent d’une amie commune. « Comment l’as-tu trouvée ? — Pas bien du tout. — La pauvre ! —Que veux-tu, elle ne sait pas gérer son deuil. »
Le deuil, la mort de l’homme que cette femme aimait, objet d’une bonne ou mauvaise gestion ! Gérer son budget, gérer son temps, gérer son énergie, gérer son angoisse et même, un comble ! gérer ses passions…Voici que le vocabulaire marchand gagne ce qu’il y a en nous de plus intime, de plus obscur.
J’ai honte pour ces deux femmes qui ignorent qu’on peut être fou de douleur et qui « gèrent » à petites gorgées leur apéritif du soir…Admettre qu’il y a en nous une machinerie avec son mode d’agencement particulier, c’est une chose…Que je gère mon deuil, que j’apprenne à « négocier » ma douleur, qu’on me prescrive un mode d’emploi, non. » C’est ce qu’écrit Jean-Bertrand Pontalis dans son livre intitulé Fenêtres.
Gérant
On devient donc gérant de sa propre vie, d’où il faut bannir toute ingérence. Le mot commerce est Emprunté. au latin commercium « négoce; lieu où se fait le commerce; droit de commercer » et « rapports, relations humaines, relations charnelles. » De ce commerce, on ne garde désormais que l’aspect marchand souligné par Jean-Baptiste Pontalis .
Puisque de commerce il est question, encore une citation de Pontalis citant Winnicott : « To my patients who have pais to teach me. » Les patients payent leur psychanalyste pour les enseigner. L’idée est plaisante, au point que les politiciens l’ont adoptée. Nous payons leur statut afin qu’ils apprennent à nous gouverner. Combien déclarent que le pouvoir leur a beaucoup appris. Ils aiment tellement progresser qu’ils ne veulent plus le quitter. Nos élus apprennent à nous gérer d’un mandat à un autre. Au profit de qui ? On ne sait trop.

