Jean-Baptiste Botul, philosophie du voyage immobile

Jean-Baptiste Botul, philosophie du voyage immobile

23 juillet 2021 Non Par Paul Rassat

Codicille en hommage à Marcel Duchamp et à sa boîte en valise

Dans un esprit de jeu surréaliste, des zozos très sérieux ont inventé de toutes pièces un philosophe, Jean-Baptiste Botul, ainsi que quelques textes donnant de l’épaisseur au personnage. Certains « penseurs » tombèrent dans le piège et furent atteints de botulisme.

   Les lignes qui suivent se situent dans cet esprit de farce, de jeu et vous donneront peut-être envie de découvrir J-B Botul.

De l’immobilité à la liberté

Jean-Baptiste Botul (1896-1947) fut un philosophe atypique. Son existence aventureuse le conduisit à inventer la valise à roulettes, qui le réconcilia avec la vie.

Il vécut les cinq ou six derniers mois de son existence dans sa chambre, à Lairière.

A l’image de Xavier de Maistre, il enferma son corps afin de libérer son esprit. La présence de la valise à roulettes maladroitement réalisée par lui-même après de nombreux tâtonnements et échecs, bien qu’immobile, libéra le champ des possibles et ouvrit pour le philosophe des horizons qu’il n’avait jusque là qu’entrevus. Immobilité et mouvement se fondirent en un nouveau concept qu’il jugea bien plus pertinent et fécond que celui de mouité. Botul put enfin s’abandonner à la pleine immobilité de la mort afin d’assurer à son esprit une mobilité parfaite.

Le vertige d’une mise en abyme

Si les quelques « bouts » qui constituent sa biographie mentionnent qu’il est mort dans l’indifférence générale, on peut penser qu’il est mort heureux, réussissant à associer mouvement et immobilité à sa fascination pour le trou dont il parle si bien dans sa  Correspondance à moi-même ,  « on peut à la fois penser au trou et au non-trou, voire au trou dans le trou. C’est-à-dire au trou percé. »

Peut-être lui est-il resté un regret, n’avoir pu réaliser la tombe à roulettes, projet dont la réalisation eût couronné le cheminement de toute une vie.

Remarque : la roulette russe n’est qu’une variante de la valise à roulettes dont Botul, en vrai philosophe, ne revendiqua jamais la paternité et pour laquelle il ne déposa pas de brevet.

Notule : Il est admis par les spécialistes de Botul qu’il travailla un temps au rayon bricolage du BHV afin de réaliser sa fameuse valise. Ce détail biographique fut longtemps tu afin de ne pas créer de confusion acronymique avec BHL.

Comme un trou (en hommage à Jean-Baptiste)

Ce serait comme un trou qui mènerait à un autre trou et ainsi de non suite et au bout d’un moment plus ou moins long, on ne saurait plus quel serait le trou de départ  puisqu’il n’y aurait pas d’arrivée. Ce serait angoissant à cause de l’impossibilité de faire son trou dans ce vide environnant. Un trou à l’intérieur d’un autre trou serait-il toujours un trou ? Possèderait-il une identité propre ? Qui se détacherait en creux dans le vide environnant ?

   On pourrait presque se demander si LE GRAND TROU ne serait pas constitué d’une infinité de petits trous mitoyens comme le temps est composé d’une infinité d’instants statiques. Si l’on s’arrête un instant à cette conception du monde, qu’est-ce qui fait que je suis davantage moi que quelqu’un d’autre spatialement, temporellement, biologiquement, spirituellement, fiscalement ? Où est la limite ? Ne suis-je pas un ensemble de moi et d’autres, un ensemble infini ?

Le bon sens comme limite

 Ce n’est pas envisageable me répond le bon sens, car le bon sens est la chose la mieux partagée au monde si bien qu’il y en a une infime parcelle en chacun de nous. Non, ce n’est pas envisageable car alors, pourquoi ne pas accepter les migrants comme moi-même et à quoi serviraient les frontières qui ont coûté tant de guerres et de morts ? A quoi reconnaîtrait-on les ennemis sinon à la possibilité de leur trouer la peau ?

Réfléchir à la notion de trou, un puits sans fond ? Non, grâce aux encouragements philosophiques de Jean-Baptiste Botul cité dans le merveilleux Du trou au tout : «  L’essentiel est de nous débarrasser du principe de non-contradiction, en posant qu’on peut à la fois penser au trou et au non-trou, voire au trou dans le trou. C’est-à-dire au trou percé. »

Bibliographie de Jean-Baptiste Botul

Jean-Baptiste n’a rien publié de son vivant mais ses thuriféraires ont retrouvé textes et correspondances.

— La vie sexuelle d’Emmanuel Kant

— Landru, précurseur du féminisme

— Nietzsche et le démon de midi

— La Métaphysique du mou*

— Du trou au tout

* On veillera à ne pas confondre le mou de Botul avec le MOU fondé par Pierre Dac. Le Mouvement Ondulatoire Unifié comptait des adhérents comme Jean Yanne et René Goscinny.