Le théâtre ?

Le théâtre ?

9 mai 2025 0 Par Paul Rassat

À quoi sert le théâtre ? À dire des trucs écrits avant par quelqu’un d’autre et faire comme si on les inventait sur l’instant. On triche, à quoi ça sert ? Concevoir une équipe comme si les gens allaient être complémentaires, c’est ce qu’on fait dans la vraie vie. Alors le théâtre serait de la vraie vie et la vraie vie pourrait passer pour du théâtre ? Ou alors tout serait vrai ? Trump et Poutine sont du théâtre, et le front est le théâtre des opérations ?

Des textes forts

Les bons metteurs en scène recherchent des textes forts.  Pour quelle raison ? Le public retrouve, immédiatement après une représentation, la langue répétitivement insipide du quotidien dans lequel, derrière, on revient vers vous pour faire en sorte d’être en capacité de pouvoir, avec le team leader, vous booster dans vos attentes et satisfaire celles-ci.  Les Français ne sont pas des Marivaux, aurait dit de Gaulle.

La pomme de la concorde

Le théâtre nous ment pour faire plus vrai. Alors quand un chef d’État ment impunément, le public/électorat est ravi. Il lui faut du texte fort, lui lécher le cul plutôt qu’un texte léché. « L’homme n’est pas là où il pense » dit Lacan. Peut-être qu’il est là où il dit sans penser. Pensé par quelqu’un d’autre ; par l’auteur. Il y aurait alors une dimension presque divine dans le théâtre. Accepter d’être pensé par quelqu’un d’autre ; être ainsi libéré de soi. Allégé-light-le temps de la représentation pour le public, le temps du personnage pour les acteurs, répétitions incluses, le temps de se prendre pour Dieu sans l’être pour le metteur en scène. Sans l’être parce qu’il doit se couler dans la réalité existante du texte, composer avec Adam, Ève et le serpent. Et puis la pomme. La pomme de la concorde. Pour Jean-Louis Hourdin le théâtre c’est « anticiper la réconciliation ».

Retrouver l’innocence

Au fond, le théâtre est une immense tarte aux pommes servie sur un plateau. Il y faut choisir la bonne variété de pommes, être bonne pâte, ajouter le moins de fanfreluches possibles, éviter le sirop de sucre qui fait briller. Nature, quoi. Comme Adam et Ève avant la pomme.

Le théâtre est pensé(e)

Si « L’homme n’est pas là où il pense », c’est peut-être qu’il n’y a pas un lieu où penser. Ni un moment. Souvent, les gens croient penser en se concentrant, en se coupant des autres, comme le penseur dans sa tour d’ivoire autrefois, ou le sage méditant dans sa cave en clair obscur. Penser , ne serait-ce pas plutôt s’ouvrir, tisser des liens avec les autres, avec le monde et avec soi-même. Il n’y a pas de pour penser.

Le plateau de théâtre est unique, il est , mais il est multiple. Partout dans le monde, depuis des millénaires. L’homme pense en se représentant le monde. Partout.