L’ordre caché de l’art

L’ordre caché de l’art

25 octobre 2025 0 Par Paul Rassat

L’ordre caché de l’art, d’Anton Ehrenzweig commence bien ! Il y est question des enfants et de leur lecture syncrétique qui accompagne leur découverte du monde. «… leur capacité syncrétique de saisir une structure globale plutôt que d’en analyser les éléments particuliers. L’art enfantin affectionne de même la structure globale, et ne s’embarrasse pas de détails analytiques. Je crois avoir préservé moi-même quelque chose de cette aptitude. Ce qui me permet de lire des livres techniques avec profit sans que tous les termes m’en soient forcément familiers. »

Un chaos apparent

Anton Ehrenzweig évoque ensuite la structure apparemment « chaotique » de ses écrits. « Il s’agit de l’illusion de ce chaos qu’offre l’immense substructure de l’art. Il est un « ordre caché » dans ce chaos, accessible aux seuls lecteurs ou amateurs d’art qui ont une réceptivité appropriée. Toute structure artistique est essentiellement « polyphonique » ; elle ne se développe pas selon une ligne unique de pensée, mais en plusieurs courants superposés à la fois. »

L’approche et la lecture d’une œuvre d’art nécessitent une attention qui est en opposition avec la logique habituelle. Celle que nous impose l’école, qui se développe avec l’apparition de l’esprit critique.

Syncrétisme analytique et vice versa

L’art et la création artistique permettent de concilier les approches syncrétique et analytique. Ils associent notre part inconsciente et la structure consciente qu’impose la réalisation d’une œuvre. Se débarrasser de la logique seule. «  Dans cette mesure, la créativité implique l’autodestruction – ce qui explique peut-être que l’art ait si souvent affaire avec la tragédie.

Conscient, inconscient, syncrétique, analytique, la réalisation artistique dépasse chacun des éléments qui la composent. Nous retrouvons ici Le détail de Daniel Arasse, le depictum analysé par Olivier Massin. La mécanique quantique et le qubit apportent aussi leur contribution à l’affaire.

S’ouvrir

Découvrant une œuvre d’art, une partie du public se sent désemparé de ne pas « comprendre ». Prendre avec soi est une chose. Limiter la lecture de l’art et du monde à ce que l’on est déjà en est une autre. Il faut aussi accepter de ne pas tout comprendre, d’être emporté, que résonnent d’autres dimensions que la logique de surface. Accepter de relier l’enfant et l’adulte, le syncrétique et l’analytique. Aller plus loin que «  Partager des émotions », tarte à la crème qui limite les émotions à leur surface d’échange et à leur éphémérité.

C’est vraisemblablement ce qu’incarnent naturellement les interlocuteurs de Conversations sur l’art d’être soi ( La nécessité interne), cette capacité de réunir toutes les dimensions possibles dans leurs créations.

PS Le lien ci-dessus en bleu mène à un enregistrement avec Fabrice Henriot, de Radio Semnoz. Il y est question de Conversations sur l’art d’être soi.