Mettre le feu
28 juin 2025Mettre le feu, oui, mais avec quoi ?
Une conversation à bâtons rompus avec un ami nous a conduits à un futur sujet de conversation très intéressant. Quand vous parlez à bâtons rompus, en effet, vous parlez de tout et de rien, sans sujet précis. Or de cette absence de sujet précis en est sorti un à traiter une fois prochaine. L’expression « à bâtons rompus » n’a pas d’origine certaine, ce qui rompt encore davantage les bâtons de la conversation.
Nous nous demandions comment obtenir un succès d’écrivain. Mon interlocuteur a proposé une immolation par le feu devant le siège de son éditeur. On sait que toute bonne édition, comme toute bonne naissance, se fait par le siège.
S’immoler devant le siège de son éditeur, donc : oui ! Mais avec quel carburant s’immoler ? Brûler trop lentement est douloureux. Trop vite, ce serait risquer de passer inaperçu. Il y faut des flammes bien visibles. Et puis, et puis, il faut désormais s’immoler écolo. Si tu salopes le monde pour attirer l’attention, tu rates ton coup. Quitte à en tirer un dernier, qu’il soit beau, écolo, médiatico.
Peut-être vêtu de laine écrue, ou bien de lin. L’idéal serait sans doute de se placer au sommet d’un petit monticule de bois comme on conseille d’en constituer dans les poêles à bois pour obtenir le meilleur tirage possible. Le feu viendrait par le siège. Il y faudrait bien sûr du bois mort dont le décès aurait été certifié par un spécialiste. Une essence qui n’enfume pas l’environnement et brûle à des températures raisonnables qui ne contribuent pas trop au réchauffement climatique.
J’ai pensé un moment que des bâtons rompus feraient l’affaire. Mais ils donnent une conversation et une combustion plutôt décousues, difficiles à canaliser écologiquement. Il est même à craindre que toutes ces élucubrations ne coûtent de l’énergie à mon cerveau, donc à mon corps, donc à la planète qui l’héberge. Il serait souhaitable, à l’avenir, d’oublier les bâtons rompus, de n’utiliser que des supports de pensées organisés en thèse-antithèse-synthèse, par exemple, qui ramassent la pensée et lui permettent de tenir sur une copie, à l’école et dans les meilleurs discours de nos élus qui, on le sait, sont des gens particulièrement économes.
Pour conclure cette réflexion : mettre le feu, oui, mais avec quoi ?