Restauration

« La Restauration  – en général –  me paraît destinée à devenir l’ultime symbole de la civilisation occidentale. Avant de se restaurer, il faut s’instaurer. Les civilisations en voie d’instauration n’ont pas d’oreilles…. » et Jacques A. Bertrand de mentionner que « les propos de table » sont réservés  à l’usage exclusif des dîneurs. «  De  ces propos d’une insupportable vacuité qui ne peuvent être prononcés, entre la poire et le fromage, que lorsque tous les besoins essentiels de la vie ont été assouvis… »

Restaurer vient du latin restaurare, reconstruire, réparer. La restauration répare nos forces. Mais restaurare flirte avec le verbe stare, se tenir debout, être stable. Rétablir une stabilité ? Au fond, la meilleure position afin de la retrouver, n’est-ce pas la position assise ?

En mars 1815, alors que Napoléon revenu de l’île d’Elbe marche sur Paris, le régime politique de la France est la Restauration bourbonienne. Elle ne fera pas le poids. Voici les gros titres que « Le Moniteur – journal officiel… consacrait alors à l’événement :

9 mars : Le monstre s’est évadé de son lieu d’exil.

10 mars : L’ogre corse a abordé au cap Juan.

11 mars : Le tigre s’est montré à Gap. Les troupes avancent de tous côtés pour arrêter sa marche. Il achèvera sa misérable aventure en fugitif dans la montagne.

12 mars : Le monstre s’est vraiment avancé jusqu’à Grenoble.

13 mars : Le tyran est maintenant à Lyon. La terreur a saisi tout le monde à son apparition.

18 mars : L’usurpateur s’est risqué à approcher à soixante heures de marche de la capitale.

19 mars : Bonaparte avance à marches forcées, mais il est impossible qu’il atteigne Paris.

20 mars : Napoléon arrivera demain sous les murs de Paris.

21 mars : L’Empereur Napoléon est à Fontainebleau.

22 mars : Hier soir, S.M. l’Empereur a fait son entrée publique, il est arrivé aux Tuileries. Rien ne peut dépasser la joie universelle. ( tiré du livre de Clément Rosset Le réel, Traité de l’idiotie).

La Restauration bourbonienne est restée sur sa faim. Ainsi que celle de Napoléon qui prendra l’eau à Waterloo. Dans sa Chronique de la vie continue Jacques A. Bertrand relève : «  Les gens sont prêts à s’enflammer pour n’importe quoi. » Pourquoi pas pour des crêpes Suzette flambées au Cointreau ? Ça restaure. Ceci dit, J. A. Bertrand, comme d’habitude a raison. Avant de restaurer, il faut instaurer, mettre en place, asseoir. Avant d’y parvenir, l’être humain mange, , bouffe, se nourrit, engloutit, se gave, bâfre, se goinfre, se serre la ceinture… Tant que la pointe de la pyramide de Maslow ne repose pas fermement sur toute la construction, l’humain se comporte comme un animal qui n’a rien à restaurer, même pas lui-même. C’est vraisemblablement à cela que pensait Bonaparte disant à ses troupes : «  Du haut de ces pyramides 40 siècles vous contemplent . »

Mais cela n’a suffi ni aux Égyptiens ni au futur Empereur. Le Guide Michelin n’existait pas à l’époque. Peut-être faudrait-il lancer un guide Michelin de la politique. S’y arrêter si le programme est sur votre route. Vaut le détour. Vaut le séjour.