Xavier Chevalier, punk dans l’esprit et dans l’art.

Xavier Chevalier, punk dans l’esprit et dans l’art.

12 avril 2021 Non Par Paul Rassat

Pour comprendre pleinement les propos de Xavier, l’esprit punk, il est recommandé d’aller faire un tour sur https://chevalier-sport.com/. La notion de pilotage vous semblera plus pertinente. Quant à celle d’accrochage, à vous de voir !

Au service de l’art

— Je n’ai jamais mélangé mon travail d’artiste et mon rôle à La Fondation Salomon.

Mais ta sensibilité, ton expérience d’artiste interviennent quand tu réalises un accrochage comme celui-ci.

C’est ce qui m’intéresse dans mon travail plastique. Mon activité au quotidien pour la Fondation, avec un curateur, avec des artistes… me nourrit pour continuer de défendre haut et fort une production personnelle. Sans cet équilibre, je boiterais. D’ailleurs, dès mon cursus aux Beaux Arts, je me suis rendu compte que j’appréciais de mettre les mains dans le cambouis pour valoriser d’autres démarches que la mienne. Je suis complémentaire, dans l’ombre, pour magnifier le ton, le sens d’une démarche artistique et inviter le public à y entrer.

Tu gardes la curiosité d’un étudiant et tu laisses tout esprit critique de côté ?

L’esprit critique est toujours présent et nécessaire pour montrer le mieux possible une exposition. Dans un esprit d’équipe. Malgré le curateur, les assesseurs, les assistants et un travail magnifique, on peut se louper. Là aussi, c’est une question du pilotage.

Être prêt à attendre et à démarrer. WAIT and SEE.

Il faut prendre des risques mais en évitant la sortie de route.

Même si on a la plus belle bagnole, il est nécessaire de doser l’alchimie du projet pour éviter de se louper. Je m’inspire de ce que font les autres en restant émerveillé, curieux.

Trouver le rythme
Entrée de l’exposition Shepard Fairey.

Bricolage punk et  liberté

Tu reviens à l’esprit punk.

Qui est de se démerder. Se donner une certaine liberté pour bien faire les choses avec une marge de créativité, de système D et d’engagement qui se traduit par la prise de risque. Pour réussir un accrochage, il faut comprendre l’artiste.

En général, tu es en étroite collaboration avec ceux dont tu montres les œuvres.

Ce n’est pas le cas pour celle de Shepard Fairey. Je l’ai découvert il y a une quinzaine d’années, il m’intéresse et je partage avec Jean-Marc Salomon un intérêt pour l’artiste. Nos curiosités mêlées m’ont poussé à aller voir d’autres expositions de Shepard Fairey. J’ai pu décider de ce qu’il fallait faire ou non pour cette exposition.

La fondamentale relation au temps

 Exposition qui est en place et qui va « dormir » un mois, en gros en attendant des directives d’ouverture des lieux d’art. On rejoint le WAIT de ton travail personnel. Ta relation au temps.

Ce WAIT est une sorte de leitmotiv. J’y ajoute une dimension épicurienne. L’attente est longue mais elle conduit à la délivrance, à l’envie de partager. Mon travail inclut le temps d’attente, la disproportion entre ce que l’on a, ce que l’on vit et le temps de la « performance ». Le jour de la course, je suis tellement stressé que je ne sais pas si je peux parler de plaisir. Punk mais pas maso ! J’aime le risque sans être suicidaire. Je sais que je vais savourer ce moment sur la ligne d’arrivée en me disant « Voila, je l’ai fait ! » Avec des bouts de ficelle. Je me suis démerdé pour faire exister quelque chose qui, à mes yeux, a beaucoup de sens familialement, beaucoup de sens par rapport à mon quotidien à la Fondation, par rapport aux gens que j’aime bien, un ensemble qui forme une équipe. Je préfère avoir un statut de punk que d’artiste.

Équilibre et esprit d’équipe

Les deux ne sont pas incompatibles.

Je ne souhaite pas lancer le débat pour savoir qui est un vrai artiste ! Mais je reviens à mon travail de régisseur à la Fondation. Il englobe le travail de la réflexion sur maquette, en équipe. Les choses se montent brique à brique, elles se tissent petit à petit pour arriver comme aujourd’hui à la dernière petite retouche. La délivrance est là. Je vais fermer la porte et on va attendre que le public arrive, qu’il ressente ce que l’alchimie a permis sans être forcément conscient du travail qu’il y a fallu. On y arrive en évitant la démonstration, la recherche de l’effet. Tout y concourt, le regard, les sens, la façon de circuler.

Tu ne rêves pas de t’installer ici ? Tu connais le lieu à la perfection.

Non, c’est comme la peau de ma bagnole : il faut sans arrêt se froquer et se défroquer. Aller voir ailleurs. Il faut être toujours en mouvement, dans l’apparition et la disparition. Dans la mue permanente, habiller un lieu pour le foutre à poil ensuite. J’en ai besoin pour échapper à mon côté parfois psychorigide. S’il faut avoir une identité marquée, le travail en équipe, comme à la Fondation, permet de ne pas s’y enfermer. Il nous pousse à nous renouveler, à échapper aux recettes toutes faites