Jubilé
10 octobre 2023Annecy fête en 2023 les cinquante ans du retour des alpages. Ce qui est un jubilé. Alain Rey nous apprend à ce sujet « D’une part, le latin iubilare a d’abord signifié « pousser des cris » d’appel, de plaisir ou de rage, la joie n’ayant rejoint ce mot qu’en latin chrétien. » Jubiler peut donc relever de la jouissance et n’est-il pas « normal » que la religion chrétienne ait transformé la jouissance en joie ? « De l’autre », poursuit Alain Rey « , jubilé, certes influencé par le latin iubilare, vient en fait de l’hébreu yobel. Ce terme désignait un animal, le bélier, puis sa corne, servant à fabriquer un instrument de musique. Celui-ci servit à annoncer une grande solennité, célébrée tous les cinquante ans et à l’occasion de laquelle les peines légales et les dettes étaient remises. »
L’éternel retour
D’après wikipédia, on pourrait grossièrement résumer l’idée de l’Éternel Retour nietzschéen en un simple précepte tel que celui-ci : mène ta vie en sorte que tu puisses souhaiter qu’elle se répète éternellement. Il faut aussi considérer que, pendant des millénaires, le temps apparaissait comme cyclique. L’idée d’un retour semble donc évidente. Héraclite fait tache dans cette conception, pour qui on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Associons donc Nietzsche et Héraclite : le retour des alpages se tient depuis cinquante ans, mais il ne rassemble pas les mêmes animaux.
L’idée de retour
Le principe du retour est rassurant. Combien sont partis acheter des allumettes sans qu’on les revoie jamais ! La disparition / retour fonde les relations entre l’enfant et sa mère. Le plaisir d’un « coucou ! » lorsque l’on réapparait après avoir été caché ! Nous avons besoin d’être rassurés et le retour répond à cette attente. Jusqu’à devenir un marronnier, vaste enfumage médiatique. Les marrons grillés, sont, en effet, des châtaignes, et les médias participent de plus en plus à notre enfumage Mais « J’attendrai toujours Ton retour… » comme le dit la chanson. Pour rendre retour et jubilé plus pertinents, pourquoi ne pas lancer les jubilés des taxes et impôts, avec remise des sommes à payer ? Il paraît que ce serait à l’étude à Annecy.
Prestidigitateur
Nous demeurons tous de grands enfants espérant le retour de ce que nous avons connu. Ceci explique le succès des tours de magie et de prestidigitation. On y fait disparaître puis réapparaître objets et personnes. C’est ce que nous apprécions chez nos zélus et dirigeants : leurs tours de passe-passe.
Marguerite
Talpa a retrouvé un entretien avec une leader de troupeau rencontrée il y a quelques années. Témoignage poignant sur une vie de vache.
Marguerite, vous étiez l’une des stars de la descente des Alpages, hier à Annecy.
Je préfèrerais que vous parliez de retour des Alpages plutôt que de descente. Le mot « descente » me hérisse le poil parce qu’il évoque inévitablement la descente d’organe. Imaginez combien il est difficile de marcher avec un truc hypertrophié entre les jambes ! On nous pousse à produire, produire…alors la descente, je ne veux plus en entendre parler.
Se taper la cloche ?
Vous étiez tout de même magnifique avec votre clarine et votre bouquet !
Tu parles ! Vous vous promèneriez avec une cloche au cou ? Il y a des gens qui, paraît-il, se plaignent du bruit des cloches et d’autres qui se moquent de ceux qui se plaignent…Est-ce qu’on a demandé leur avis aux vaches ? Est-ce que c’est rigolo de trimballer un truc qui vous sonne aux oreilles toute la journée ? Vous vous en fichez ! On commence à placer des puces électroniques sur les humains parce que ce serait plus pratique et on demeure dans le folklore avec les animaux. Quant au bouquet ! je suis allergique à certaines fleurs, alors… !
Il y avait, paraît-il, dix mille personnes pour admirer et applaudir ce retour des Alpages.
Ce qui prouve que les gens n’ont pas grand chose à faire ! Est-ce qu’on a demandé leur autorisation aux animaux pour les faire défiler, les exhiber ? Je suis peut-être une bête, mais je ne suis pas idiote. Les animaux ont des droits ! Qu’on nous fiche la paix, au moins jusqu’au moment où on finira dans vos assiettes et où toute la tendresse que vous voyez dans notre regard se transformera en tendreté que rehausseront non plus des fleurs mais quelques herbes aromatiques.
PS
On apprend que » Noiraude » ne fait plus partie des noms attribués aux vaches, car trop connoté.