Migration
2 décembre 2023Migration, vu pour l’ouverture d’Hivernal Festival, est un film animé de bonnes intentions. On sort de sa projection revigoré, emballé par le mouvement. La narration et l’esthétique fonctionnent. Tous les thèmes importants, même philososphiques, traversent le film. L’enjeu ? Découvrir la richesse et la profondeur chez soi ou bien parcourir le monde. La première solution semble ringarde. Va pour l’aventure ! Et l’humour qui lie le tout est l’équivalent en cuisine de cette sauce qui assure son harmonie au plat.
Et même
« C’est quoi un canard à l’orange ? — C’est toi avec des oranges. » Cette réplique digne d’Audiard traite de l’identité à la façon d’une recette de cuisine. « Comment peut-on être persan ? » demandait Montesquieu. Comment peut-on être soi sinon en le découvrant grâce aux autres ? Et comment, étant pleinement soi, éviter d’être cuisiné par d’autres ? Il y faut une forme de candeur qui tienne de la force. Candeur qui renvoie à Voltaire et à son Candide pour traverser le monde et ses violences. Faire voyager des canards migrants dans la jungle de New York ! Et en profiter pour transformer la Statue de la Liberté en « Statue verte ». Découvrir le monde par soi-même, décapé de tout kitsch, de toutes références, de tout préjugé. Se découvrir en découvrant d’un regard neuf.
Et pourtant
On ressort de la projection joyeux, léger. Et pourtant…ce divertissement réussi aurait pu être plus profond, moins dans les recettes qui marchent bien. Nous le porterions plus longtemps en nous. Le voyage, les bons et les méchants…tout sent le déjà vu consensuel. Légère frustration, même si le rythme des trouvailles soutient le film.
Que faut-il en retenir ? « Il faut cultiver notre jardin » écrirait Voltaire. Et ce jardin, c’est nous ; où que nous soyons. Nous, les relations avec les autres, avec la nature. Nous sommes en migration permanente. Et Migration aurait gagné à migrer vers davantage de profondeur au lieu de s’en tenir à des recettes, même excellentes.