Quatre

Quatre

18 février 2024 Non Par Paul Rassat

A — C’est difficile de discuter avec toi !

B — Pourquoi ?

A — Tu ne parles que de toi.

B — Et alors, ça te dérange ?

A — Oui, non, mais moi aussi j’aimerais parler de moi.

B — On parlerait de nous ?

A — Nous ? Ce nous, ce serait toi + moi ?

B — Ou moi + toi, c’est pareil.

A — Ah ben non ! L’ordre est une hiérarchie. Et puis, est-ce que moi + moi = nous ?

B — Ben oui, comme 2 et 2 font 4.

A —  2 + 2 font 4 ? Dans son Don Juan, Molière écrit «  2 et 2 sont 4 ».

B — Et alors ?

A — Et alors ? ils sont  4, ils ne font pas  4. Ils sont et 4 est, tu comprends ? 4 est une réalité qui dépasse le résultat d’une simple addition. 4 a son existence propre. Sa propre réalité. Mathématiquement, il est bien le résultat de 2 + 2, mais philosophiquement, il est une réalité en soi.

B — Alors, 4, ce n’est pas 2 + 2 ?

A — Oui et non. Ça peut être 4 dès le départ, un truc en soi, pam ! dès le départ. Ou bien 1 + 3, ou 3 + 1, ou 6 – 2…

B — C’est vertigineux ! Je n’y avais jamais pensé.

A — 4, c’est 4 et autre chose que 4. On y arrive par des chemins différents.

B — D’accord, mais…4, c’est toujours 4 ?

A — Comme tu es toujours toi, calme, en colère, seul, amoureux, joyeux, triste…

B — Tu crois que 4 est parfois triste ?

A — C’est possible, oui.

B — Comme toi ?

A — Ou comme toi.

B — Comme nous ?

A — Oui et non. Nous sommes tristes différemment, toi et moi.

B — Si on arrêtait de couper les cheveux en quatre , toi et moi ?

A — Nous ?