Quatre
18 février 2024A — C’est difficile de discuter avec toi !
B — Pourquoi ?
A — Tu ne parles que de toi.
B — Et alors, ça te dérange ?
A — Oui, non, mais moi aussi j’aimerais parler de moi.
B — On parlerait de nous ?
A — Nous ? Ce nous, ce serait toi + moi ?
B — Ou moi + toi, c’est pareil.
A — Ah ben non ! L’ordre est une hiérarchie. Et puis, est-ce que moi + moi = nous ?
B — Ben oui, comme 2 et 2 font 4.
A — 2 + 2 font 4 ? Dans son Don Juan, Molière écrit « 2 et 2 sont 4 ».
B — Et alors ?
A — Et alors ? ils sont 4, ils ne font pas 4. Ils sont et 4 est, tu comprends ? 4 est une réalité qui dépasse le résultat d’une simple addition. 4 a son existence propre. Sa propre réalité. Mathématiquement, il est bien le résultat de 2 + 2, mais philosophiquement, il est une réalité en soi.
B — Alors, 4, ce n’est pas 2 + 2 ?
A — Oui et non. Ça peut être 4 dès le départ, un truc en soi, pam ! dès le départ. Ou bien 1 + 3, ou 3 + 1, ou 6 – 2…
B — C’est vertigineux ! Je n’y avais jamais pensé.
A — 4, c’est 4 et autre chose que 4. On y arrive par des chemins différents.
B — D’accord, mais…4, c’est toujours 4 ?
A — Comme tu es toujours toi, calme, en colère, seul, amoureux, joyeux, triste…
B — Tu crois que 4 est parfois triste ?
A — C’est possible, oui.
B — Comme toi ?
A — Ou comme toi.
B — Comme nous ?
A — Oui et non. Nous sommes tristes différemment, toi et moi.
B — Si on arrêtait de couper les cheveux en quatre , toi et moi ?
A — Nous ?