L’imagination ?
22 janvier 2025Retour à Henri Laborit et à son livre L’homme imaginant, et donc aux vertus de l’imagination. Celle-ci est devenue innovation, progrès en se rabougrissant.
« Il faut toujours revenir aux questions fondamentales sous peine de s’égarer.
1°) Que fait l’homme sur la terre ? Il vit, ou , plus précisément il survit…
2°) Pour y parvenir, dans un perpétuel échange d’énergie avec son milieu…il a dû s’adapter à lui et adapter celui-ci à ses besoins.
3°) Il y a été aidé par un phénomène biologique particulier qui est sa faculté d’imagination ou, en d’autres termes, de restructuration originale de ses expériences acquises, ou transmises, à travers les générations par le langage .
4°) On peut donc admettre que cette adaptation, facteur de sa survie, sera d’autant meilleure que son expérience est plus vaste.
On peut donc en conclure que son but essentiel est la « connaissance » indispensable à sa survie. Ce n’est qu’après que par son travail, il changera le milieu suivant une structure imaginée par lui et favorable à sa survie. Il n’es pas vrai que « le travail constitue l’essence de l’homme » ( Marx). »
Quitter les rails
Si la nature a pu être hostile à l’homme, dangereuse dans les débuts, celui-ci a appris à la maîtriser. Malheureusement, il a gardé les mêmes schémas de fonctionnement et a voulu la dominer et l’exploiter toujours davantage au lieu de composer avec elle. Revenons à l’importance de l’imagination :
« …l’homme est bien un animal qui fabrique des outils, mais s’il n’avait pas accru scientifiquement sa connaissance du monde, il en serait encore à l’ère du silex taillé. Bien plus, ce n’est pas le fait de tailler le silex qui fut le fait humain, mais bien d’imaginer qu’en taillant le silex, l’efficacité du poing humain serait plus grande. »
L’imagination et la gestion
C’est une vision du monde qui permet de développer des outils et des savoir-faire, qui enrichissent en retour notre vision du monde et ainsi de suite. Or notre société a inversé ce développement vertueux. La rentabilité, la gestion, la comptabilité ont pris le dessus sur l’imagination. Celle-ci leur est subordonnée. Elle s’en trouve bridée. Quant à notre vision du monde, elle est parcellaire, saucissonnée comme la répartition des taches dans le travail. L’ensemble de nos vies est taylorisé, le travail n’a plus de sens parce qu’il est émietté. Pour lui redonner un peu de signification, on lui plaque dessus « la valeur travail ».
L’embourgeoisement
Henri Laborit souligne que « cette évolution a été rendue possible par les classes dominantes, bourgeoisie et bureaucratie ». D’où l’intérêt pour celles-ci de faire disparaître jusqu’à la notion de classe sociale. Enfumage. Et pendant ce temps Elon Musk et Jeff Bezos gagnent la guerre de l’espace pour quitter une Terre qu’ils ont largement contribué à endommager. Les circuits de l’argent et du profit se concentrent de plus en plus et on envisage de faire travailler les Français sans rémunération sept jours par ans. Cherchez l’erreur.
Revenons sur Terre
Dans la bonne ville d’Annecy, « Petite Venise des Alpes » on fourbit les listes pour les prochaines élections municipales. La cité a connu le centre précautionneux , le centre inexistant, la mosaïque inexistante, vert-rouge, surfant sur les modes et les éléments de langage et n’oubliant pas, au passage, l’agressivité et la violence intra municipales. Il faudrait en 2026 une vraie renaissance capable de redonner à la ville l’élan culturel qu’elle a connu après la seconde guerre mondiale. Notre cité s’essouffle au ras du bitume et des plans divers dont celui de circulation. Un retour de l’imagination est impératif : faire de la ville et du territoire un atelier, un laboratoire d’expérimentation culturelle, industrielle, citoyenne. Proposer, réaliser et non subir ! La truite d’argent est l’emblème local. Il semble qu’il n’y ait pas de devise. Significatif ?
Vœux
Le 18 janvier 2025, Antoine Armand et Danièle Carteron présentaient leurs vœux à Annecy. Il y a été question de dévouement à sa commune, à la région et à la France. Propos touchants, profondément humains et justifiés. L’employé, cependant est tout autant dévoué à son entreprise si celle-ci le traite correctement et s’il y trouve de quoi vivre dignement. Il a été question de faire des compromis qui ne soient pas des compromissions. C’est bien toute la question. Assistaient à cette présentation de vœux toutes sortes d’élus venus renifler ce qui pourrait se dessiner aux prochaines municipales. Changer de bord pour servir son propre intérêt ? Continuer à slalomer d’étiquette en étiquette ?
Travail et imagination
Revenons au propos d’Henri Laborit. Le travail est indispensable. Il doit cependant être au service de l’imagination. Ne faisons pas de procès d’intention à Antoine Armand. Nous sommes curieux et pressés de découvrir sa vision pour Annecy. Sans imagination capable de réunir le meilleur des Annéciens, les compromis deviendront, comme ils le sont actuellement, des compromissions servant les intérêts personnels des uns ou des autres. Cette vision doit venir de la connaissance de la ville, de son passé, des perspectives possibles permettant de créer un NOUS. Partir de l’intérieur, du cœur et non faire appel, pour le plan de circulation, à une agence qui n’aurait jamais pris le temps de passer à Annecy. Ne pas faire appel à Biltoki, entreprise louable mais basque, pour la halle gourmande prévue au Haras, mais inventer un modèle local, adapté aux conditions locales. Réfléchir plutôt qu’aller piquer des idées toutes faites ici ou là.
La « valeur travail »
À l’école, comme ailleurs, le travail doit avoir du sens en lui-même. À cette condition il est possible de produire des efforts surprenants. Si le sens n’est pas immédiatement perceptible, le plaisir peut aider. Les deux, combinés, sont l’idéal. Sinon, nous avons des employés à bout de souffle, des élus recroquevillés sur leurs intérêts personnels mais se croyant utiles parce qu’ils se « dévouent ». Et prêts à se dévouer encore. Indéfiniment. Sans imagination.