Vendée Gobe Challenge
21 janvier 2025Interview exclusive des deux premiers navigateurs du Vendée Gobe Challenge, Charlie Dalautre et Yoann Prudhomme. Nous confondons la parole des deux compétiteurs.
— Vous battez de loin le précédent record. Comment l’expliquez-vous ?
Le matériel est de plus en plus performant, et nous apprenons peu à peu à le maîtriser. Ce voyage immobile dans sa propre chambre est un défi pour la technologie. Les pièces sont de plus en plus isolées grâce à de nouveaux matériaux et à des techniques d’assemblage révolutionnaires. Nous planons pratiquement au-dessus du temps et des contraintes de la réalité quotidienne. Il faut parfois choquer, c’est-à-dire réduire notre vitesse jusqu’à l’immobilisation parce qu’on pourrait passer la vitesse de la lumière et disparaître à jamais.
Cette notion de voyage immobile n’est-elle pas un paradoxe ?
Oui et non. Certains s’agitent beaucoup et n’arrivent nulle part. Nous sommes immobiles dans notre chambre mais notre esprit voyage.
Comment peut-on parler de compétition si chacun est totalement isolé dans son monde ?
Revenons à la notion de paradoxe. Plus on s’agite, plus il y a de mouvement social en soi et autour de soi et moins on sent la réalité, moins on ressent la présence des autres. Les échanges sont éphémères. Totalement isolé, immobile, on capte tout avec une acuité accrue. Je sentais la présence de Yoann et Yoann sentait la mienne. C’est ce qui nous a poussés à nous concentrer davantage pour parvenir à ce record incroyable.
Est-ce encore de la navigation ?
Bien sûr que oui. On traverse des tempêtes intimes. Parfois il faut savoir prendre la décision de contourner des obstacles personnels infranchissables. La météo ? Notre état intérieur qui peut aller du calme plat et improductif à l’orage, voire à la tempête. Le naufrage est toujours possible : c’est alors la cure en structure psy pour se remettre.
Comment juge-t-on de l’arrivée ?
C’est simple : on franchit la ligne d’arrivée quand on a fait le tour de soi-même.
Charlie, Yoann, quelles relations y a-t-il entre vous ?
Nous sommes compétiteurs, donc en lutte pendant la compétition, mais inséparables parce que rester seul, enfermé dans sa chambre, n’aurait pas de sens si l’on n’avait pas conscience de la présence de l’autre.
Comment voyez-vous l’avenir de la compétition ?
Puisque c’est une plongée en soi, il n’y a aucune limite. La notion de record n’a aucun sens, même si tout le monde en parle.
Jusqu’où aller ?
Au plus profond, dans l’inconnu. C’est ce qui fait l’intérêt du VGC, une aventure humaine au sens le plus prononcé. Certains s’égayent dans les montagnes, dans l’espace, sur les mers, dans les drogues, font des pirouettes, du sensationnel. Le VGC dépasse tout ça, de très loin. Ce n’est pas vraiment télégénique mais on s’en fiche .
Quels conseils donneriez-vous aux aspirants compétiteurs ?
Soyez-vous-mêmes. Vendée Gobe Challenge, une expérience en immersion.