Un Festival d’images

Un Festival d’images

8 juin 2022 Non Par Paul Rassat

L’image est la représentation concrète d’une chose. Une copie plus ou moins fidèle dessinée, peinte, sculptée. Elle est aussi ce que l’on voit en rêve, en songe. Donc la charnière entre rêve et réalité, pour peu que ces deux mondes soient distincts. Et un Festival d’images est une fête qui mêle toutes ces dimensions. C’est ce qu’accomplit le Festival International du Film d’Animation d’Annecy.

Les clichés d’une identité

Quand on discute avec les Annéciens et les Haut-Savoyards de l’identité du territoire émergent aussitôt les clichés. Les montagnes, le lac, les valeurs locales. (Quelles sont-elles?).

Mouvement

Le mouvement apparaît, en réalité, comme l’axe central qui anime le territoire de Savoie et se retrouve dans un alliage de tradition et de modernité.

Le mouvement de la tradition

Étymologiquement, la tradition est d’abord l’action de transmettre et puis vient ensuite la notion d’héritage transmis. Il semblerait que le deuxième sens ait pris le pas sur le premier. Ainsi, tout est moderne un jour et tout devient tradition par un acte de transmission. C’est le cours naturel des choses, leur mouvement. En innovant, on crée de la tradition. C’est le mouvement.

En bonne intelligence

Mouvement dans lequel se trouve inévitablement la Savoie mais qui a su en jouer, le renforcer ou l’orienter dans de nombreux domaines quand d’autres territoires ont joué et jouent encore la carte de l’opposition pour s’affirmer. C’est avec intelligence que la Savoie évolue, avec intelligence, ce qui signifie étymologiquement en créant des liens, en s’ouvrant à travers ces liens plutôt qu’en s’opposant et en se fermant. Le mouvement est une ouverture permanente aux autres et à soi. Un enrichissement.

Réalisation de Franz Schimpl

Être soi pour s’ouvrir au monde

 Le polycentrisme propre au territoire de Savoie est la résultante des contraintes liées au climat, au relief, que les Savoyards ont su transformer en diversité et en richesse. Pas d’immense métropole mais un tissu continu qui mêle les villes à la campagne, les campagnes à la montagne et les montagnes aux villes. Quand certains cherchent à définir une région ou un territoire à travers des valeurs fortes, marquées et donc un peu caricaturales, pourquoi ne pas s’appuyer au contraire sur la diversité, l’adaptabilité et le mouvement ? Pourquoi vouloir ressembler aux autres quand il est possible d’être soi-même pour mieux s’ouvrir au monde ?

Le mouvement comme démocratie

Dans L’idée même de richesse, Alain Caillé écrit : « Si mesure pertinente de la richesse il doit y avoir, c’est donc certainement en premier lieu à l’échelle des individus ou des territoires. Non pas en se demandant en quoi ces territoires se conforment à une liste de critères généraux établis à l’avance et censés valoir pour l’humanité entière et pour tous les temps, mais, au contraire, à partir des définitions et des critères de richesse – ou de prospérité, ou de bien-être, etc.- élaborés par les habitants eux-mêmes, pour un temps donné, en fonction de leur inscription concrète dans un espace-temps social, culturel, économique et historique déterminé. Au-delà ou en amont de la mesure elle-même, l’élaboration des indices devient alors un outil de participation et de délibération démocratique. »

Par-delà les clichés, les images vraies

C’est donc de ce mouvement que naît la véritable démocratie, et non des clichés qui plombent la pensée comme « La Savoie, ce sont les montagnes, les paysages… », ce qui est censé ne jamais changer à l’échelle humaine. Beaucoup nous ont fait croire, parce que cela leur profitait, que le mouvement constitue un risque et engendre de l’insécurité ; la physique quantique nous apprend que la réalité n’est qu’interaction.

La culture participe de l’indispensable mouvement

Ne pas oublier que le Festival qui ouvre sa nouvelle édition le 13 juin est l’héritier de cet immense mouvement culturel qui éclot après la deuxième guerre mondiale. Tout comme Bonlieu Scène Nationale. Gaby Monnet, Michel Vinaver ont participé à cet élan culturel et à cet esprit de résistance au poids des clichés. Vive les images et l’animation !

Jacques Villeglé

Une pensée particulière pour Jacques Villeglé, passeur et recycleur d’images, animateur d’alphabets urbains. L’anarchiviste est maintenant anarchivisé.