Couscoussier
6 septembre 2025Le couscoussier est à l’image du couscous, à moins que ce ne soit l’inverse. Les deux sont inséparables. Contenant et contenu se confondent. Le couscoussier est de ces plats qui réunissent dans leur appellation l’ustensile et la réalisation à consommer. La terrine fait partie de cette particularité. Comme le bento, la timbale, la cassolette qui a donné le cassoulet, le tajine et bien d’autres. Un ustensile né pour une recette, c’est l’adéquation parfaite. ( En photo, des plats creux pour la cuisine; pour ainsi dire des moules)
Déjà chez Rabelais
Ajoutons à cette harmonie celle de la musique. Le mot couscous ou couscoussou apparaît déjà avec Rabelais sous la forme coscosson. Le mot vient du berbère. Il constitue aussi, paraît-il une onomatopée. Le son de la graine roulée à la main selon la tradition. La musique du couscous rejoint celle de la bouillabaisse qui mêle bouillir et abaisser : quand ça bout, abaisse le feu.
Recette poétique
Le couscoussier permet tous les modes de cuisson. Le braisage rejoint la cuisine à l’étouffée et celle à la vapeur. Il permet une approche « holistique » qui réunit les modes de cuisson, la viande, les légumes et le blé. De plus, le contenant et le contenu ne font qu’un, le couscoussier et le couscous, le fond et la forme, le corps et l’esprit en une parfaite adéquation. C’est le principe de la poésie. Comme avec celle-ci, il y a la recette fixe, le couscous royal ( une hérésie inventée pour l’Europe) et toutes sortes de recette originales. De l’alexandrin au vers libre, du royal au républicain ou au révolutionnaire.
Rotondité
Le couscoussier ( comme tous les plats ?) est rond. La poêle, elle aussi, est le plus souvent ronde. Mais elle est plate. Le wok s’élève. Le couscoussier parachève cette tentative d’élévation qui couronne d’un couvercle. Rappelons la proposition d’Alphonse Allais : fabriquer des casseroles carrées afin d’empêcher que le lait ne tourne.
Métaphore
Le couscoussier est à l’image du corps, esprit et matière confondus mais étagés. Cerveau, vapeur aérienne, graine en haut. Viande et légumes terrestres en bas. L’ensemble est ensuite servi lié par une sauce pas trop abondante pour les puristes. Creusez la graine en son centre, disposez viande et légumes au milieu, vous obtenez l’image de notre planète.
Minute !
En comparaison du couscoussier, la cocotte minute est une pâle proposition de l’ère industrielle dont le but serait de nous faire gagner du temps. Non seulement elle n’est pas minute, mais elle fait pression sur notre rythme de vie et nous fait parfois péter les plombs parce que sa soupape et la nôtre n’y suffisent plus. Mijoter, mitonner, cuire à petit feu, longuement, prendre le temps, c’est tout l’art du couscoussier. Celui-ci réunit les nourritures venues du sol, considérées autrefois comme impures et celles qui poussent au-dessus du sol, autrefois réservées aux nobles. C’est ce qui fait du couscous un plat universel et du couscoussier l’ustensile idéal.

On retrouve cet hommage au plat et au plat dans cette évocation tirée de l’album d’Astérix Le Tour de Gaule.
Et enfin…
Notons que le couscoussier peut, à l’occasion, faire office d’antenne parabolique. On le voit pour cette raison fleurir sur certains balcons.