Décarboner

Décarboner

6 août 2023 Non Par Paul Rassat

On a inventé le verbe décarboner alors que son contraire ne semble pas exister. Le dictionnaire du scrabble le confirme, carboner n’existe pas. Nous avons donc carboné le monde sans le savoir ! Ceci dépasse, et de loin, ce que le commun des mortels appelle «  la vraie vie ». Car dans la vraie tout compte. Tout ce qui est concret, comptable, additionnable, soustractible  ( soustrayable ?)ou divisible. Nous avons carboné à tout vat et à l’insu de notre plein gré. C’est même le précédent au dopage à la Virenque dans le cyclisme. Le précédent aussi du fameux «  Responsables mais pas coupables » de Laurent Fabius et Georgina Dufoix dans l’histoire du sang contaminé. Partant de là, comme dit l’autre, tous les responsables politiques devenaient, si nécessaire, responsables mais pas coupables.

– dé

Le préfixe –dé est l’un des principes essentiels de nos vies. Il y eut le déremboursement de certains médicaments. Certains furent de nouveau remboursés, donc dédéremboursés. La déconstruction à la Derrida a récemment fait des émules du côté des féministes. Il s’est agi de déconstruire le modèle masculin dans ses aspects machistes et patriarcaux. Mais c’est dans le domaine de la décarbonation que le préfixe prend sa pleine dimension. Car un préfixe vient s’ajouter à un mot existant pour en infléchir le sens. Or, carboner n’existant pas, décarboner n’en est ni l’inverse ni le contraire. La décarbonation existe donc par elle-même, comme née d’une forme de génération spontanée.

Décarboner le tourisme

C’est sur les zondes qu’un spécialiste déclarait «  Il faut décarboner le tourisme ». Il ajoutait « Il ne faut pas sous estimer les capacités à rénover les imaginaires du voyage. » Ce type d’énonciation est véritablement merveilleux. «  Il ne faut pas sous estimer », circonlocution passe partout qui veut tout et ne rien dire. Le mot capacité, lui, fait partie de la fameuse « trousse à outils » qui permet d’emporter avec soi les éléments de langage basiques indispensables à une com de masse. Quant au mot  imaginaires, le pluriel lui donne un éventail infini de possibilités. Parmi celle-ci, le retour à Xavier de Maistre et au Voyage autour de ma chambre. Le tourisme écologique par excellence!

Conclusion

Comment conclure ces réflexions sinon par une pirouette ? Puisque de com il est question, un homme AZERTY en vaut-il deux ? Une proposition sérieuse cependant : pourquoi ne pas proposer de nouveaux verbes comme modèles des groupes de conjugaison ? Décarboner pour le premier groupe. Écologir pour ledeuxième. Verbe présentant l’avantage d’être un néologisme et d’associer l’écologie et l’action. Dédétruire irait parfaitement pour le troisième.