Dégoulinade annécienne

Dégoulinade : «  le fait de dégouliner ».

Dégouliner : «  S’écouler goutte à goutte ou abondamment… Dér. avec suff. -iner* de dégouler « s’épancher »… dér. de goule (gueule).

Ça dégouline

« La confiture ça dégouline par les trous de la tartine… » chantaient Les Frères Jacques. La ville d’Annecy dégouline elle aussi ; et c’est comme ça qu’elle a de la gueule ? Elle déverse son trop plein d’animation, de gens, d’agitation sur le pourtour du lac, sur les communes environnantes et au-delà.

 La ville d’Annecy dégouline et en rajoute : elle tartine !

Non seulement l’animation, l’agitation, le bruit et la pollution dégoulinent sur les environs, mais des strates de peinture décorative recouvrent le sol de la ville. La signalisation devient déco en toc. La déco prolonge l’événementiel. L’événementiel a peu à peu remplacé la culture. Jusqu’alors on vantait « le merveilleux terrain de jeu » que constituent les montagnes environnantes et le lac. Désormais la ville elle-même devient terrain de jeu, jeu de piste dans tous les sens, dessus-dessous, giratoires, interdits, canalisés. Une sorte de boboïsation galopante et touristique envahit la ville. Alors on lui donne le cadre que l’on pense approprié.

Pléonasme

On surligne ce qui mériterait d’être suggéré, laissé au hasard de la découverte et de la surprise. Le pléonasme est de rigueur : des traits en forme de vagues signalent une cohérence un peu forcée avec le lac. On indique au sol : «  Bienvenue dans le quartier du lac. » On montre, on affiche, on montre du doigt, ce qui était grossier autrefois. Une sorte de mauvais goût ostentatoire envahit la cité. Un style de parvenu qui rappelle Annecy Paysages dirigé par Salvador Garcia.

Ce matin, des touristes hésitaient entre la Vieille ville et les églises ou bien le parcours insolite. D’autres faisaient la queue pour un sandwich.

Un peu de légèreté ?

Rappelons une fois de plus ce dessin de Sempé. Il montre une jeune femme accueillant une classe du primaire et déclarant aux élèves : «  Je vais vous montrer ce que vous allez voir. »

« De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. »

                                   Paul Verlaine

Poésite aiguë

C’était hier le printemps des poètes. Sinspirant d’un poème de Prévert, Pour faire le portrait d’un oiseau

« …Peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
La poussière du soleil
Et le bruit des bêtes de l’herbe dans la chaleur de l’été… »

La ville d’Annecy a décidé de peindre le goudron couleur goudron, l’herbe en vert, le lac en bleu-vert et de pulvériser du gaz bleu pour signifier le ciel.