Deux amis sur mes épaules
16 octobre 2024Deux amis sur mes épaules de Lee Suyeon au SEUIL.
Tout en douceur, Lee Suyeon traite un sujet grave : comment vivre avec un traumatisme que l’on porte en soi depuis l’enfance et comment parvenir à s’en alléger ?
La question a été traitée un nombre incalculable de fois déjà. L’intérêt de ce livre est de l’illustrer, à tous les sens du terme, à l’accompagner, à en montrer la partie émergée et la partie cachée. L’image tient pleinement son rôle : dessin (avec très belles couleurs) et métaphores. Elle montre, dit, associe, révèle. La touche de poésie la fait vivre.
Une lecture révélatrice
Cette lecture s’adresse à tous les publics, aussi bien à l’enfant qu’à l’adulte. Elle perce la surface de nos vies pour découvrir nos motivations profondes, nées souvent de notre enfance mais qu’un enfant ne sait pas dire et qu’un adulte doit taire et finit par enfouir dans un oubli apparent.
La Fontaine, psy en plus
Une autre « trouvaille » de Lee Suyeon est de traiter les relations entre les humains par le biais des relations entre les animaux. À la différence d’un La Fontaine, elle y inclut la dimension psy. Ce détour nous rend observateurs de nous-mêmes sans aucune frontalité. Il montre que sous des apparences très diverses, les personnages sont tous des animaux, comme, sous des apparences diverses, nous sommes tous humains. Prendre des détours pour mieux toucher ! Paradoxe apparent du tact et de la sensibilité. Et puisque de détour il est question, prendre soin des autres, c’est apprendre à prendre soin de soi.
Un peu de poésie ?
Ce récit permet de parcourir un chemin qui va de l’inconscience au déni plus ou moins volontaire jusqu’à l’acceptation lucide et affectueuse. Le poids de nos vies se fait alors plus léger. Rachid Benzine dit « Si la poésie ne change pas le monde, elle peut changer ma relation au monde. » Poésie, psychanalyse ? Quand les deux sont liées ce n’est que mieux. On pourrait se contenter de se glisser dans le vocabulaire habituel et déclarer que ce livre est lui-même un » objet transitionnel. » Il est un poème illustrant le propos de Serge Tisseron dans Fragments d’une psychanalyse empathique : » Le protocole initial de la psychanalyse a été conçu pour leur[les personnes]faire comprendre que le monde qu’elles croient affronter est en réalité réduit aux grandes figures de leur enfance. »
Poésie et empathie réunies, aussi bien pour les adultes que pour les enfants!