Dieu et le toboggan

Dieu et le toboggan

2 juin 2024 Non Par Paul Rassat

Le toboggan est initialement un « traîneau sans patins, fait de planches recourbées à l’avant, appelé aussi traîne sauvage. » Il est devenu indispensable dans les parcs de jeux pour enfants. Le principe du toboggan devenu jeu pour enfants est une indispensable initiation à la vie. Monter pour redescendre, s’élever et retomber. Pendant que les enfants pratiquent cette activité éducative, les plus jeunes demandent presque inévitablement à leurs parents, installés près de la structure glissante, le regard protecteur sur leur progéniture : «  Regarde, maman — Regarde papa ! » Et de glisser pour remonter. C’est le début d’une accoutumance à la vie et à une présence protectrice. C’est Dieu et le toboggan.

Dieu

Grandissant, l’être humain a parfois tendance à se sentir seul. Les promesses des uns et des autres ne se réalisent pas toujours. Les espoirs personnels et professionnels non plus. L’école semble avoir pout but principal de couper le cordon familial et d’apprendre aux plus jeunes à garder les fesses quelques heures par jour sur un banc ou une chaise. Le regard protecteur a disparu. Alors ? Alors Dieu. Il est ce regard que l’on imagine protecteur lorsque nous pratiquons le toboggan de la vie.  » Regarde, Dieu, j’ai un nouveau boulot, je suis au chômage, je me marie, je divorce, il y a encore un débat politique à la TV ». Même si Dieu n’existe pas, il faudrait l’inventer. «  Regarde, Dieu, je zigouille des otages en ton nom ! Regarde, Dieu, je bombarde avec l’assistance de l’intelligence artificielle des gens bien vivants qui ne le seront plus longtemps. »

Indispensable ?

Les parents et Dieu sont-ils indispensables au toboggan de la vie ? La procréation emprunte désormais d’autres chemins. Le statut et le rôle de parents évoluent. Et Dieu ? Pour les chrétiens il est le Père, et le patriarcat en prend actuellement un coup derrière les génitoires. Alors ? Revenir à l’existentialisme. La noblesse de tout être humain serait de se comporter moralement, éthiquement, généreusement, humainement sans que soit nécessaire le regard des parents ou celui de Dieu. Camus a écrit qu’il faut imaginer Sisyphe heureux. Comme un gamin qui invente le toboggan loin du regard de ses parents.

Image

Le dessin qui illustre cet article est un scoop. Nous l’avons retrouvé dans les archives de l’école de Mondovi. Il s’agit d’un dessin réalisé par Albert Camus en cours élémentaire. On y voit Sisyphe faisant du toboggan. Toute la philosophie de notre prix Nobel est déjà dans cette représentation de la vie.