Juliette

Juliette

7 mars 2024 Non Par Paul Rassat

Au pays des merveilles de Juliette chantait Yves Simon. Juliette, chanteuse, conteuse, humoriste, rêveuse nous convie à partager , de surcroît, nostalgie et poésie. Elle se plaît à jouer, avant tout conteuse pour qui tout fait récit, histoire jubilatoire. Juliette aime à passer de la mélancolie au jeu de mots bien lourd qui libère et détend : «  Métaphysique car il fait froid dehors. » Par ce froid de l’actualité, elle réchauffe en faisant feu de tout bois, de tout mot, de toute image. (Photo©WATGC).

Honorer les fantômes

On voit ou entend passer sur scène les fantômes qu’elle honore.

— J’lui trouve un goût de Brel.

— Y’en a.

Et puis Barbara dans sa longue robe noire. Mireille, peut-être, Trénet ? Brassens. Boule de Suif, la prostituée de Maupassant, reine du carnaval social. Colette, féministe avant l’heure. L’abricot libertin de Colette Renard se mue en tarte. Peut-être voit-on passer Zorro sur son cheval. Dans ce tourbillon riment les mots housse et gousse.

Le zeugma l’habite ( comme Satan ?)

Juliette chausse la nostalgie comme ses lunettes et enfile la poésie comme une housse de couette, avec une volupté sisyphéenne. Chemin faisant elle explore, vagabonde autour d’un mot, d’un thème, file la métaphore. Le glissement de sens lui permet de garder l’équilibre sur tous les escaliers qui mènent à Rome. Les Tontons Flingueurs refont un tour de scène. Les petits Mussolini des bacs à sable font un clin d’œil à Poutine et à bien d’autres qui en prennent plein la tronche. Juliette est une morpionne qui rend hommage aux fantômes, défie une fois de plus le diable. Le zeugma l’habite en « une chanson qui se passe en Gascogne et de commentaire. »

Exploratrice

Elle exprime, déplie, déploie mots, sens et, redevenue petite fille, joue de ses pierres précieuses retrouvées, dont la lumière éclaire sa poésie. Le décor est à l’envi ; tente royale suggérée par quelques draperies tendues ou bonbonnière  à savourer jeux de lumière, de poésie et nostalgie. Et puis, chantant Anne Sylvestre, le plus grand auteur de chansons, elle se joue des genres, masculin ou féminin, majeur ou mineur, chic ou populo.

Oxymore, mon amour

«  Y a-t-il une vie après le théâtre ? » finit-elle par (se) demander. Où est le théâtre ? Où est la vie ? La scène se referme sur les trois coups du brigadier, inversant  spectacle et « réalité ». De celle –ci, que retenir ? L’atroce farce jouée par Poutine ? Le grotesque de Donald ?

Avant le salut final ( sans connotation communiste) un musicien la présente comme «  Juliette , dans le rôle de Juliette Noureddine ». Mise en scène, en abyme, en boîte, en jeu de miroirs qui rejoignent l’oxymore existentiel de Michael Edwards : » être et ne pas être », mon cher Hamlet !

Vers la fin du tour de chant, de scène et de poésie une voiture miniature vient chercher Juliette. On attendait une Alfa Romeo, ce fut une Deux Chevaux. Normal après un spectacle émaillé de chansons épiques et hippiques.

À savourer.

PS

Juliette chante en français, sans traduction simultanée, ce qui pourrait dérouter certains publics.