La pluie à Annecy

La pluie à Annecy

14 juin 2023 Non Par Paul Rassat

« Produire », disent-ils

Fallait pas l’inviter ! CITIA avait invité François Hollande en 2016. Le Président qui fait pleuvoir. Et depuis, il pleut pendant le festival. « Fallait pas l’inviter » clamait Michel Muller dans sa chronique canalplussienne à l’époque où Canal +justifiait son signe +. La pluie s’invite donc régulièrement à Annecy. Le Festival du Film d’Animation a commencé.

Rencontré à Annecy une jeune équipe travaillant dans la 3D. C’est leur premier Festival. Ils sont surpris par les prix réservés aux professionnels. Cher! Il est assez vite question de la qualité des films. Pour eux, l’avancée technique permet de produire vite et beaucoup. Trop. La qualité s’en ressent. Michel Ocelot souffrait des années à réaliser un Kirikou : contraintes techniques, budgétaires, financement…Le film avait le temps de mûrir! On se souvient du film primé en 2016 à Annecy, La tortue rouge. Bienveillant, consensuel, amalgame de bonnes intentions. Esthétiquement insipide. Sa première qualité était peut-être sa marraine, Salma Hayek.

Et pourtant !

Quelques heures avant de recevoir le Prix du Jury, Sunao Katabuchi  m’accordait une interview. En voici les premières lignes. L’intégralité de la conversation sera plubliée très prochainement.

Vous dites que l’animation vous permet de coller le plus près possible à l’Histoire, ce qui est paradoxal parce que le public sait que l’animation est un artifice.

Je peux vous répondre par un exemple. Dans le film, Dans un recoin de ce monde, tous les appareils volants, tous les avions ont été déterminés de façon très précise, et en poussant la recherche encore plus loin que celle que nous avons faite, il serait possible de retrouver le nom des pilotes, et en poussant plus loin encore de retrouver pour chacun ce qu’il a fait pendant son enfance, quand il était plus jeune. Ce qui m’intéresse, c’est qu’à l’extérieur du film, du cadre, on a un monde réel et je me suis dit que la manière de rendre ceci le plus fidèlement possible est le dessin. Lorsque je dessinais le personnage de Suzu, les arrière-plans, les appareils, tout ce qu’on voit dans le film, tout faisait partie de la même dimension.

Couronné lui aussi en 2016, le film de Sunao Katabuchi est une recherche de vérité historique et humaine intransigeante. Le cinéma d’animation peut aider à pousser plus loin les exigences humaines et artistiques. L’art doit déranger l’ordre établi, le cours subi des choses. Là est sa grandeur et sa raison d’être.