Les gens, les vraies gens qui draguent, bossent, vivent
25 juillet 2021Portraits de gens d’été. Draguer, bosser, exister en attendant l’automne
Ils sont drôles, les gens, non ? Si divers au cœur de l’été ! Le m’as-tu-vu qui ne voit que lui. La jeune fille qui sent le truc à la noix de coco, à la pomme verte ou à un autre arôme synthétique qui lui enlève toute dimension naturelle à la période de sa vie où elle devrait l’être le plus. La entre deux âges, plus toute jeune mais pas défraîchie, montée sur semelles compensées censées compenser quoi ? Robe, maquillage au millimètre. Espèce d’uniforme dans lequel on peut se demander s’il y a vraiment quelqu’un. Le mec bronzé, arborant une pierre à l’oreille, barbe de trois jours, savamment décoiffé, lunettes de soleil perchées sur le haut du crâne. Il tchatche, tente d’accrocher quelqu’un à sa logorrhée. Intéressant de voir les gens le fuir discrètement. Un malheureux se laisse prendre. Comme la mouche qui se débat sur le tortillon poisseux dont elle ne peut se décoller, il tente de réagir, de placer quelques répliques et puis renonce.
Draguer avec Romeo
La nana en Alfa Romeo sport qui roule bien au-delà des 50 à l’heure autorisés, vous rattrape, fait des appels de phares, tente de vous doubler malgré la ligne continue et le terre-plein central et finit par s’assoupir dans la circulation voiture contre voiture. Le type de soixante-dix ans (plus, moins ? difficile à dire) velu, crépu, ventru, le maillot de bain hors d’âge peinant à contenir le volume d’une conserve d’un autre âge qui tend à s’affaisser et force les cuisses à s’écarter sous le poids d’un ventre bouddhesque, en équilibre sur sa petite chaise de plage pliante pliée sous le poids la marque du bronzage sur les cuisses liée au port du short estival bien apparente mais malgré tout incertaine à cause du camouflage naturel fourni par les boucles grises d’une pilosité exubérante, le type qui manifestement est content d’être là.
Ceux qui bossent
Le mec qui bosse pendant que les autres sont en vacances, qui conduit comme il peste, vous colle, téléphone d’un œil, conduit d’une oreille et tourne le volant avec ce qui lui reste. L’artisan qui demande à son coéquipier « Tu sais c’est où qu’on va ? » assurant un télescopage entre le discours direct et le discours indirect propre à donner un tournis grammatical carabiné.
Les autres
La vieille dame discrète, habillée sobrement et pour pas cher mais bien, qui sent une odeur agréable et très naturelle de propre. Le conducteur qui roule avec le volume de sa chaîne stéréo réglé de manière à flinguer les oiseaux sur les fils électriques et de qui on peut se demander s’il n’a pas besoin de se prouver qui existe, s’il a raté sa vocation de DJ, ou si dans un élan de générosité extraordinaire il souhaite faire partager à tous les inconnus qui croisent son chemin ce qu’il pense être la meilleure musique de l’univers. Le motard à moto qui se confond avec l’accélération pétaradante de son engin.
Vive cette exubérance et cette variété estivales sans lesquelles on apprécierait moins l’arrivée de l’automne !
Les puristes (Il y en a!) feront remarquer que l’on n’est pas encore au cœur de l’été. Ils ressemblent à l’allumeur de réverbère du Petit Prince qui oublierait le réchauffement climatique.