Louis Jouvet : le théâtre ?

Louis Jouvet : le théâtre ?

22 juillet 2022 Non Par Paul Rassat

Rencontre à Cluny avec Jean-Louis Hourdin. Pour parler de théâtre, bien sûr. Cette conversation fera l’objet d’un ou deux articles. En attendant, ce texte tiré d’un manuscrit, Brouillon d’un livre à venir, hommage à la poésie dramatique, au théâtre, à ses interprètes et au public… que me remet Jean-Louis. Extrait de ce « brouillon », un texte de Louis Jouvet, que Jean-Louis Hourdin m’a lu, la rue à deux pas.

« LE THÉÂTRE SATISFAIT EN NOUS,

RÉPOND À :

un besoin de songerie,

un vide intérieur,

un goût de distraction, de recherche, d’amplification,

un goût du plaisir, rires et larmes,

une satisfaction des penchants, vertus et vices.

Besoin de solitude et de possession, qui va de pair avec l’envie de se

défaire de soi-même, de se quitter, de s’oublier, d’être dépossédé de soi,

besoin de combler ce qu’il y a de versatile et d’enthousiaste en nous,

besoin de juger et d’apprécier, d’être supérieur,

besoin d’éprouver et d’être confortable et assuré en éprouvant,

d’échapper au pacte social,

en même temps que de se réconcilier, de communiquer, de sympathiser

avec l’espèce,

de se retrouver ailleurs, autrement,

de refaire en soi une unité,

d’assurer une continuité entre des états de conscience

d’affirmer son ignorance,

de pouvoir se perdre, s’annuler,

d’être, de se trouver une ressemblance, de devenir l’être qu’on souhaite,

de s’user — vivre,

d’arrêter en soi la vie présente,

de suspendre son souffle,

de tromper le temps et l’espace,

d’avoir une sécurité provisoire,

d’obtenir une communion,

de se posséder,

d’entrer, d’être dans un contact,

de trouver une énigme, de chercher le mystère, de s’élancer vers le

surnaturel,

de célébrer la solidarité humaine,

de trouver un équilibre,

d’obtenir une solitude neuve et peuplée. »

Fusion, oxymores

Et c’est ainsi que le théâtre conjugue les opposés, lie l’individu et la communauté, transcende les barrières pour parvenir à donner ces moments que Jean Dasté, cité par Joseph Paléni, appelait « la fleur ». Il y est question de communion.