Monique Degluaire, céramiste

Les environs de Cluny sont riches d’artisans et d’artistes.  Parmi lesquels Monique Degluaire de qui l’atelier accueillant se situe entre Cormatin et Chapaize. La rencontre avec la céramiste établit une relation paisible, rassurante au monde du vivant sous toutes ses formes.

— Je pratique le modelage dans la masse. Lorsque j’arrive le matin dans mon atelier, je commence à rêver, à dessiner comme ici. Je pensais à un escargot et d’un seul coup à un cheval. L’ensemble devient une chimère qui les associe.

Vous parliez de modelage dans la masse. C’est ce qui donne un certain volume à vos créations ?

J’aime travailler les formes rondes. La sensualité de la terre y invite et appelle ce type de formes. Mon travail s’apparente à un journal. Certains écrivent tous les jours. Mon mari a remarqué que les éléments de notre vie se retrouvent plus ou moins dans mes œuvres.

Les grenouilles aussi ?

Lorsque j’étais enfant j’habitais en Bresse où je pêchais les grenouilles. Je les imitais, elles m’attiraient. Les animaux me permettent de faire passer des choses, des sentiments que ma timidité m’empêche d’exprimer autrement.

Vos grenouilles ont des poses très particulières.

Comme mon père qui communiquait avec eux, j’ai toujours été proche des animaux. Nous les avions tous à la maison. Je me sens proche d’eux davantage qu’humaine ou animale.

Vos personnages féminins sont comme dans des cocons.

Ce sont des formes d’œuf. D’où vient ce thème ? Il faudrait une psychanalyse pour élucider la question. Je n’ai pas de prédilection pour un animal ou un autre, pour un thème ou un autre : je fais ce que j’ai envie de faire suivant mon inspiration du jour. L’ensemble peut paraître hétéroclite mais c’est mon journal.

Des tonalités se dégagent une harmonie, une cohérence.

Je fabrique aussi mes couleurs. En ce moment je suis dans les bleus. À l’entrée ? C’est une maman et sa fille. Peut-être moi. Mon travail est assez féminin, on peut y voir la notion de transmission.

Les animaux transpirent la douceur. Leur regard est bienveillant. Ils pourraient être des compagnons mais aussi les protecteurs du lieu, de la sérénité.

Ils sont des amis.

Plus loin, c’est la Vierge à l’enfant ?

Une mater dolorosa. C’est une femme triste consolée par sa petite fille.

Vous inversez la relation. On a envie de toucher votre travail.

Le contact est rugueux.

Mais pas désagréable. Comme à mi-chemin.

Je suis toujours à la recherche de quelque chose. Oui, je suis une chercheuse. J’ai toujours besoin d’aller vers autre chose pour évoluer.

Ce buste a un regard frappant !

Elle s’appelle La guerrière. C’est moi par moments. Ici , c’est notre fille quand elle était ado. J’ai appelé cette réalisation Jeune fille aux plumes. L’aspect ? La couleur ? C’est la terre naturelle par-dessus laquelle je mets ce bleu. Pas partout, afin d’avoir du relief, des contrastes.

Une densité remarquable se dégage des pièces que vous exposez. On a l’impression qu’elles nous fixent et nous accompagnent.

J’aime quand c’est vivant, contrairement à la mode actuelle qui produit du statique, hiératique. Je veux que mes personnages soient sur le point de bouger pour accompagner la personne qui regarde. Hier, une visiteuse m’a dit «  Vous savez, vous m’avez un peu sauvé la vie. » Elle n’allait pas bien et avait décidé de se faire un cadeau. Elle s’est offert l’une des petite pièces que j’appelle des amours. Elles sont toutes différentes. Depuis cette sculpture l’accompagne tout le temps et lui fait du bien. C’est pour cette raison que j’ai besoin de montrer mes réalisations.

Elles semblent danser. C’est aussi comme si la forme, pourtant complète, était encore rattachée à la matière d’où vous l’avez tirée.

Je les extrais de moi !

Nous parlions de transmission !