Ce qu’on mange : le faire voir
19 août 2023Épisode quatre traitant de la nourriture et de la cuisine. Comment on faire voir ce qu’on mange peut valoriser ou tromper.
Mise en scène
Jusqu’au Moyen Age on s’ingénia à ces mises en scènes qui consistaient à replacer la bestiole cuite dans ses plumes ou bien dans sa peau afin de la présenter dignement aux convives. Le procédé s’accompagnait parfois de l’usage de lourds parfums afin de masquer les odeurs de faisandé voire de pourriture.
» Qu’est-ce que tu vas manger »
Totalement modernisé et aseptisé le procédé fait fureur grâce à la photographie. Un penseur des 20° et 21° siècles, Gad el Maleh, le souligne dans l’une de ses œuvres. Il y déclare à propos de cette pratique qu’elle permet de voir « qu’est-ce que tu vas manger. »
Il est cependant amusant de constater que te montrer « qu’est-ce que tu vas manger » permet de mieux te tromper, mon enfant car les logiciels de retouche deviennent l’ingrédient majeur des recettes industrielles.
Montrer, masquer, tricher sur la marchandise…on retrouve dans le domaine de la cuisine l’éternelle querelle des Anciens et des Modernes qui sévit dans tous les domaines artistiques et plus particulièrement en littérature.
Tradition, innovation
Les premiers se cantonnent à l’imitation des anciens réputés insurpassables et chaque génération y apporte une nouvelle strate d’ornementation et d’hommages.
Les seconds veulent être de leur temps, innover. C’est de la conversation entre les deux mouvements que naît la création. Elle est un dialogue entre l’ancien et le contemporain, entre le superflu et le nécessaire, entre le lointain et le proche. On retrouve ce même mouvement entre la Réforme qui prônait le retour aux textes originaux, l’allègement de soi et des pratiques et la Contre Réforme de laquelle naquit le baroque.
Orner, décorer, amplifier ce qui existe déjà, quitte à le dissimuler volontairement ou non, ou bien aller vers le naturel, le dépoussiéré qui montre le sens et la matière.
De l’importance de la cuisson
Tarabiscoté ou bien direct ? Ce sont les deux rhétoriques principales de la gastronomie.
Auxquelles il convient d’ajouter les différents modes de cuisson car, nous l’avons vu avec « Pourquoi j’ai mangé mon père », la gastronomie dépend aussi de la maîtrise du feu. Dans « L’amateur de cuisine » Jean-Philippe Derenne y prévient « Ce livre de cuisine est un livre…Avec la troisième partie (« Au travail ! ») sont abordées les recettes. Elles ne sont pas présentées dans l’ordre traditionnel du repas, mais en tenant compte des principes de cuisson ou de préparation. »
Braisé, à l’étouffée, à la vapeur, mijoté….rôti ou bouilli ?