Le vêtement et la pensée

Le vêtement et la pensée

18 août 2023 Non Par Paul Rassat

« La pensée abhorre le justaucorps » écrit Umberto Eco dans La guerre du faux. L’auteur établit dans un passage de ce livre une correspondance entre le vêtement et la communication. Si « La pensée abhorre le justaucorps », que penser de l’effet du costume sur la pensée. Si le costume comporte trois pièces, il est à l’image de l’organe sexuel mâle et conditionne le raisonnement en une classique composition : thèse, antithèse, synthèse.

Privilégier l’ampleur

«  J’ai alors pensé combien dans l’histoire de la civilisation l’habit-armure a influencé la contenance, et, donc, la moralité extérieure. Le bourgeois victorien était raide et compassé à cause des cols durs, le gentilhomme du XIX éme siècle était déterminé, dans sa rigueur, par des redingotes ajustées, des bottines et des hauts-de-forme qui ne permettaient pas les mouvements brusques de la tête…Un vêtement qui comprime les testicules induit à penser de façon différente…Mais on peut dire la même chose…du cou, des épaules, de la tête, des pieds . Une humanité qui a apris à marcher avec des chaussures n’a pas développé sa pensée de la même manière que si elle avait marché pieds nus…Eco cite alors les habits amples des moines, les robes de chambre des penseurs, les « amples chemises drolatiques à la Balzac.

Mao et moi

Nous eûmes la mode du col Mao. Le costume classique a repris le dessus. Une féministe soutenait dernièrement sur les zondes que, s’ils portaient jupes et robes, les hommes penseraient autrement. Les péripatétitiens de l’antiquité pensaient en marchant. Étaient-ils pieds nus ? Diogène, vêtu de son seul tonneau, en faisait faire à la pensée.

Un peu de couleur dans la pensée

Avez-vous regardé des photos représentant les membres d’un gouvernement ? « De l’uniformité naquit l’ennui » écrivait Houdart de La Motte. Les ministres et le Président se doivent d’afficher, par la maîtrise des couleurs, une certaine absence de couleur de leur pensée. Ils doivent « faire sérieux » à défaut de l’être dans leurs décisions. Ici, l’habit fait le moine. Cédric Villani ne traîna pas dans le milieu politique. Son apparence ne correspondait pas. Et puis, ce très sérieux mathématicien se fie parfois à l’intuition, cet ample vêtement de la pensée qui invite celle-ci à danser.