Premier mai

Premier mai

2 mai 2024 Non Par Paul Rassat

Mieux vaut célébrer le premier mai le deux car, le premier étant chômé, il est difficile de travailler à le célébrer. Étonnant, d’ailleurs, qu’on fête le travail par un jour chômé. C’est un peu comme fêter la sexualité par un jour d’abstinence. Marion Maréchal, mue par une sorte de strabisme historique, célèbre l’événement dans le village natal de Jeanne d’Arc. Là où notre héroïne nationale entendit des voix, Marion va en pêcher. N’étant pas à un paradoxe près, soulignons celui-ci : le livre que Jean Teulé a consacré à François Villon débute par la mort de Jeanne sur le bûcher anglois. Grillée, carbonisée [l’époque n’était pas encore à l’écologie].Plus loin dans le roman, un bourreau bien français transforme un condamné en une sorte de pot au feu dont les yeux ne sont pas une image. Les Anglois font griller, les Français bouillir : c’est le monde à l’envers !

Fête et travail

Cette fête du travail pose problème à certains zélus de droite. L’avis de Laurent Wauquiez ? Les Français sont des feignasses, des assistés qui profitent de la moindre occasion pour glander aux frais de l’État. Pour lui, le premier mai est un jour de travail comme un autre puisque son travail consiste principalement à être en représentation. Le séjour récent au Japon ? Du travail !

Entretien avec un tortionnaire

N’hésitant pas, dans un souci pédagogique, à creuser de toutes nouvelles galeries, Talpa a obtenu une interview exclusive d’un tortionnaire. Par respect pour lui, nous ne dirons pas s’il exerce en Syrie, en Russie, dans un lieu délocalisé au service de telle ou telle grande puissance. Notre interlocuteur exerce même le premier mai, ce qui lui pose un cas de conscience. Le lien étymologique entre travail et torture donne tout son sens à cette agréable conversation.

—  Torturer, est-ce un plaisir pour vous ?

—  Pas du tout ! Vous imaginez qu’on peut prendre plaisir à mettre quelqu’un sous tension ? Quand j’utilise la gégène, je suis moi-même sous tension nerveuse extrême. Je dois d’ailleurs vous avouer que je suis partisan des moyens traditionnels, la gégène, l’immersion dans l’eau ou un autre liquide, les coups. On voit ce qu’on fait, on paie de sa personne, on assure le sévice. La torture psychologique…j’y crois pas. Y’a des gens qui n’ont aucune psychologie, alors comment voulez-vous les torturer ? Et puis, c’est comme l’orthographe qui est liée à l’histoire de la langue. Utiliser tel ou tel moyen de torture, c’est s’inscrire différemment dans l’Histoire, avec une majuscule, monsieur !

—  Et supprimer la torture ne serait pas une manière plus noble de s’inscrire dans l’Histoire ?

— Non, monsieur, ce serait l’arrêt de celle-ci. Le tortionnaire est indispensable à l’Histoire et à la Vérité, comme l’oxygène à la vie et la sardine à l’huile. Et puis, en torturant  les corps, on évite aux gens d’avoir à se torturer l’esprit. Nous les délivrons, nous sommes des bienfaiteurs de l’Humanité, monsieur.    

— Vous disiez que la torture ne vous apporte aucun plaisir. Elle est donc un travail pour vous. Comment pouvez-vous accepter de travailler un premier mai ?

— Je fais une exception qui confirme la règle. Voulez-vous essayer, juste pour le plaisir ?

— Non merci. Je dois vous quitter, j’ai justement un autre rendez-vous avec un psy…avec…au revoir  monsieur…au revoir.

Devinette

Définition de mots croisés pour trouver un nom de 10 lettres :  » C’est un beau rôle mais il faut le bûcher ».