« Toutes les choses géniales ». Rumilly, Quai des Arts
15 novembre 2021Un spectacle ancré dans la vie
Conversation avec Didier Cousin, acteur de Toutes les choses géniales
Vous présentez prochainement au Quai des Arts de Rumilly, le 17 novembre, Toutes les choses géniales. Comment définir ce spectacle ?
C’est le récit d’un homme qui dresse une liste de choses géniales. Il a commencé le jour de la première tentative de suicide de sa mère. Le texte a été écrit par Duncan Macmillan à la suite de deux ans de rencontres avec le public, grâce à un acteur de stand-up. L’écriture s’est construite à partir de ces échanges.
Le jeu, l’échange animent la représentation
Justement. Puisque vous êtes vous-même sur scène, la relation avec le public est un peu particulière ?
Oui. Nous formons un cercle au milieu duquel je me trouve et, par moments, je fais appel aux spectateurs. Ils jouent certains personnages : mon père, ma femme… La liste en question accompagne celui qui raconte tout au long de sa vie et l’aide à la construire. Les spectateurs jouent mon assistante sociale, le vétérinaire…
Votre inspecteur des impôts ?
Non, ça n’entre pas dans les choses géniales (rires).
Le public participe
On dit souvent que les représentations de théâtre sont différentes d’un soir à l’autre. Pour vous, c’est réellement le cas.
Tout dépend de la façon dont les participants incarnent les personnages. Nous avons beaucoup travaillé sur la qualité de la proposition faite aux spectateurs. Il n’y a aucune violence mais la volonté de jouer avec, ensemble. Ils ne sont pas « utilisés ».
Il y a donc chaque soir des inflexions en fonction du jeu des spectateurs.
La formation en cercle est rassurante. Tout le monde voit tout le monde et la façon dont la personne sollicitée incarne son personnage. L’approche n’est pas frontale mais entièrement partagée.
« S’émerveiller du journalier »
Toutes ces choses géniales sont de l’ordre du quotidien.
Oui, de la couleur jaune à l’âge de sept ans, jusqu’à une approche plus philosophique. Jusqu’à un million de choses géniales.
Notre société exige de plus en plus de superlatifs, de spectaculaire aussitôt oublié. Vous êtes à l’opposé.
Dans les petits riens de la vie, faciles à partager, comme un coucher de soleil. Des choses que tout le monde peut observer à condition d’en prendre le temps. Ce qui nous a surpris, touché, étonné dans la journée.
Michel Vinaver dit s’émerveiller du journalier.
L’expression correspond tout à fait à ce spectacle. Nous partons d’un sujet sérieux : comment vivre avec une mère dépressive et suicidaire. Mais l’auteur montre comment l’imaginaire permet de s’en sortir. Le spectacle donne beaucoup d’énergie. Il traite d’un sujet grave mais dans un registre drôle.
À chacun de bricoler sa propre liste
Ce n’est pas une recette mais une invitation pour chacun à produire sa propre liste.
Bien sûr, c’est à chacun de faire sa liste. L’auteur ne propose d’ailleurs qu’une partie du million de choses qui composent la sienne.
Une rencontre qui dépasse la scène
Comment vous sentez-vous à la fin de chaque représentation ? Mieux, meilleur, plus léger ?
C’est extrêmement sympathique à jouer. À la fin de la représentation les gens ont à disposition de quoi écrire pour rallonger la liste des choses géniales. C’est un moment très agréable.
Un souvenir, un moment qui vous a plus particulièrement marqué ?
Dans le spectacle, je rencontre ma future femme dans une bibliothèque. Nous sommes tous les deux de grands lecteurs. Je lui adresse la parole et, au lieu de me répondre, une spectatrice se met à pleurer. C’est un moment incroyable. Tout le monde est suspendu et on ne peut rien faire d’autre qu’attendre. Elle se reprend et dit le texte. C’est un moment que je ne sais pas qualifier ! Il s’est produit quelque chose qui dépasse la représentation et qui y mêle intimement le réel.
Et des prolongements ?
À la fin de votre tournée avec ce spectacle, vous ouvrez un cabinet de psy ?
Non ! Non ! ( rires). Peut-être une exposition avec toutes les choses proposées par les spectateurs.