Discours, paroles et musique chez Asters

Discours, paroles et musique chez Asters

31 juillet 2023 Non Par Paul Rassat

Voici le texte du discours prononcé lors de la dernière AG d’ ASTERS, en juin 2023. L’association s’installait officiellement au Manoir de Novel (Annecy). Thierry Lejeune, président d’ASTERS et homme qui connaît la musique, commençait son discours en chanson. Son expérience de notaire doit y être phonétiquement pour quelque chose.  Quant à la référence à l’oxymore, dès le début de cette intervention, elle montre que le bonhomme n’a pas les deux pieds dans le même sabot. L’écologie n’impose pas de doxa et peut ne pas être dénuée d’humour!  

« J’ai souhaité commencer ce rapport en vous rappelant cette chanson mythique écrite par Paul Simon en 1964, reprise ici par Emiliana Torrini, et dont le titre en forme d’oxymore n’a cessé de m’interroger.

En 1964, Simon faisait avec cette chanson l’amer et l’affligeant constat du manque de communication et de partage entre les hommes, et il faut constater que malgré l’explosion des médias de tous ordres depuis cette date, au point que les mots sont partout, rien n’a beaucoup changé.

J’ai le sentiment qu’en 2022, et après deux ans de Covid, nous, les élus et les salariés, n’avons pas pu, pour différentes raisons, nous exprimer autant que nous le voulions dans nos paroles et dans nos actions, et qu’en tous cas il a été souvent très compliqué d’être écouté, entendu et compris, financé aussi, alors même que la dégradation de notre environnement, de la biodiversité, du climat, de la ressource en eau, s’accélère beaucoup plus vite que prévu, sans contestation aucune et de façon très alarmante.

Ce paradoxe est difficile à comprendre et les petites boites chantées de façon prémonitoire par Graeme Allwright constituent autant de cloisonnements qui nous empêchent de connaitre et de comprendre l’autre.

Ainsi et par exemple, je ne suis pas totalement satisfait de la relation menée en 2022 et même avant, avec la profession agricole avec laquelle nous avons du mal à partager et qui entend souvent prêter à Asters des intentions amalgamées qui ne sont pas les nôtres ; il est nécessaire de trouver ici un dialogue apaisé et constructif,  en tenant compte de la cohabitation complexe entre pastoralisme et prédation, contre laquelle et au sein des réserves naturelles de nos montagnes, nous tentons d’expérimenter et d’aider. Nous sommes des partenaires authentiques et sincères, chacun doit le comprendre ; la mise à disposition de bon nombre de nos terrains à des agriculteurs en est la preuve indéniable et répétée.

Les très nombreux débats avec les cinq Cen de la Région Aura pour obtenir  des services de celle-ci un nouvel agréement et la validation de notre  nouveau Paq, en exigeant de nous la création d’une nouvelle structure destinée à nous fédérer, sans pour autant augmenter nos ressources, nous ont épuisés en 2022,  et là aussi les phrases ont été nombreuses mais sans grande productivité, du fait notamment de modèles économiques et de tailles très différents, pour des espaces naturels proches de la carpe et du lapin tels  les glaciers de Chamonix et le bocage de l’Allier. Dans tous les cas, les six Cen sont agréés pour 10 ans et le nouveau Paq, finalisé, va unir nos actions communes et c’est une double satisfaction. La Région nous propose en 2023 d’autres actions et nous en reparlerons.

La nouvelle relation à organiser avec le Département après 14 mois de doutes et d’interrogations, motivée notamment  par le souci  de ne plus financer le fonctionnement de nos structures et la volonté d’instaurer une nouvelle politique des espaces naturels , tout cela  se comprend parfaitement,  mais là aussi le silence imposé nous a couté et il n’était pas obligatoire de nous le faire supporter ; il a passablement inquiété et déstabilisé  élus et collaborateurs ; le message du président Saddier en novembre, le travail des équipes et les contacts renoués avec Magali Mugnier , nommée comme vice-Présidente d’Asters, nous ont rendu le sourire.

Le chantier du Manoir de Novel , dont vous pouvez aujourd’hui apprécier l’ampleur, entamé en janvier 2022, a été l’occasion d’une incroyable aventure, justifiant nuits et cheveux blancs à certains, et a été l’occasion de découvrir le fossé culturel séparant d’un côté services de la Drac et architecte du patrimoine et de l’autre notre modeste association soucieuse, ce qui est sûrement déplacé, du budget de ses travaux et du confort au travail de ses collaborateurs ; beaux échanges là aussi.

Ce chantier nous a permis aussi de dialoguer avec le monde du Btp, souvent imprévisible, mais efficace et professionnel dans cette restauration complexe d’un bâtiment historique classé ; je crois que nous avons pu ensemble nous connaitre et nous apprécier ; bravo à toutes les entreprises et bravo immense au cabinet Brière, notre maitre d’œuvre.

Mais l’année 2022 nous a permis aussi de montrer nos compétences et implications au profit de nos partenaires habituels et d’organiser de beaux événements, le rapport d’activités vous en fera la description. J’adresse ici un merci sans mesure à notre belle équipe qui constitue la sève de notre Association.

Au sujet de celle-ci, force est de constater que le dialogue social au sein d’une structure désormais composée de plus de cinquante salariés est à parfaire, malgré les efforts de chacun, et que nous n’avons pas assez progressé comme certains le voudraient. Trop de chantiers en 2022 nous ont rendus négligents à ce titre.

Cette année a vu aussi les liens renforcés avec les usagers sportifs par la signature de différentes conventions liées au partage des espaces montagnards, sur les thématiques par exemple du dérangement  de la faune ou de la protection de l’avifaune, gypaète en tête, avec par exemple Rte, les grimpeurs , les parapentistes et les domaines skiables, comme elle a vu de belles mesures compensatoires négociées avec les aménageurs routiers.

Nous avons aussi  développé  cette année un nouveau partenariat multiforme avec le monde de l’entreprise, car c’est l’un des acteurs essentiels de la transition environnementale et climatique,  et qu’il y a là un potentiel de partage et de ressources non négligeable pour nous  ; les liens crées avec Idée ou Green et la naissance de notre fonds de dotation sont de bonnes bases que nous souhaitons entretenir avec des professionnels qui sont motivés et soucieux d’avancer, comprenant pour beaucoup l’urgence de la situation que nous partageons, pour ce qui concerne par exemple la décarbonisation  des activités ou les services procurés par la nature .

Le proverbe africain prétend « quand un arbre tombe, on l’entend, et quand la forêt pousse, pas un seul bruit »

Sauf, sans doute, le bruit ou le prix du silence. »

Thierry Lejeune

Juin 2023