L’eau, le lac d’Annecy

L’eau, le lac d’Annecy

3 octobre 2023 Non Par Paul Rassat

Le docteur Servettaz publiait en 1977 L’eau, la vie d’un lac alpin, chronique de la sauvegarde du lac d’Annecy. Son action fut déterminante pour le lac en question et pour la ville. Voici quelques extraits de son livre. Ils permettent peut-être de mesurer ce qu’est devenu le lac  au regard des conseils et avertissements remontant à 1977 : gestion de l’eau, nuisances diverses, pollution, transport, tourisme, surfréquentation…

Divorce concepts / comportements

« Les besoins sont liés à l’avancement des civilisations avec des pointes de demandes auxquelles la gestion est souvent inadaptée…Ce divorce entre nos concepts, comportements et les nécessités, nous amène à frôler à tous moments la catastrophe économique, même dans les régions d’abondance. L’eau est trop banale pour s’y intéresser !…L’adulte pressé n’attend d’ordinaire des rivières et des lacs que son plaisir : la pêche, le bain-bronzage, la voile, le bruyant ski-nautique, l’arrosage du jardin, le lavage de sa voiture, l’hygiène des salles d’eau et w.c….

Les conséquences du capitalisme

Comment ? on manque d’eau dans l’agriculture ?  Est-ce possible en 1977 ? Nos troupeaux n’ont plus d’herbage ni de boisson ? À qui la responsabilité ? Au régime capitaliste ou au régime capricieux de la nature ?…

La destinée première et finale de ces eaux rassemblées ici par la nature généreuse est d’étancher la soif de tous et de tout et non d’être comme certains naïfs ou simplistes le croient, un support de la houille blanche ( ?) un stade polymorphe nautique, à la rigueur un absorbeur d’affluents pollués…

Il est alors question du ski nautique «  indiscipliné »…polluant, bruyant.

Ce merveilleux « terrain de jeu » comme disent certains

Le lac par sa taille, son encaissement qui répercute les vrombissements par phénomènes d’échos, tolère mal ces nuisances majeures. Rêvons aussi de barques de pêche, de pédalos pour touristes, propulsés à l’électricité…énergie propre, silencieuse, ne traumatisant ni le poisson ni nos tympans.

L’auteur insiste sur la spécificité de chaque lac. Celui d’Annecy «  demeurera ainsi sans altération, entraînée inévitablement par une fréquentation anarchique ; nous le voulons grande zone de calme, de sécurité pour tous les usagers. Le lac pur, le lac sûr, le lac silencieux, le lac poissonneux…

Préserver la nature

Évaluant le travail accompli, le docteur Servettaz continue : « Le droit à la nature peut être satisfait, en contrepartie l’avenir exigera toujours des devoirs de respect à son égard et des protections étendues à tout le bassin versant…Je pense aux routes qui cernent de près les rivages, à leurs revêtements ; aux accès discontinus aux plages, à leur nombre ; aux campings surchargés…à la défiguration de la charmante physionomie de zones jusqu’ici préservées…

… Sa surveillance ( [ du lac] comme la discipline des riverains devront être no seulement maintenues mais progressivement plus strictes…si plus nombreux sont les hommes qui viendront vivre sur ses rivages heureux.

Mesurant une fois de plus l’effort accompli et son résultat à l’époque, le docteur Servettaz  continue.  « Le public en sera-t-il reconnaissant ? Le tourisme ignore nos efforts et s’empare au fort de l’été de ce bien fragile comme d’un équipement public, veillons à l’en protéger…

Préserver à la fois les hommes et la nature

 Ainsi est restitué aux populations locales, à tous et à chacun un bien sain, hier en perdition. Nos devoirs envers la nature et les hommes se confondaient très heureusement, ils sont accomplis avec une réhabilitation des eaux.

   Les collectivités ont les lacs qu’elles méritent, dont elles tirent orgueil ou honte…

       Celui d’Annecy sera la fierté de ma génération

                                                                             Annecy, avril 1977. »