Les choses simples d’Éric Besnard

Les choses simples d’Éric Besnard

27 février 2023 Non Par Paul Rassat

Les choses simples sont à la fois un film et une fable qui évoquerait Le rat des villes et le rat des champs. À la différence que le bonheur ne serait ni dans les villes, ni dans les champs, mais dans un savant équilibre entre les deux. Souvenir de cette colle posée, paraît-il, lors d’un oral. Vivre à Sparte ou à Athènes ? Le candidat aurait répondu «  Ambassadeur de Sparte à Athènes. »

Fuir les excès

Il faut fuir les excès qui tournent à la caricature. L’écologie spartiate. Jardin, source, maison en bois au milieu des montagnes. Travail du bois, vie rustique pour l’un des personnages du film incarné par Grégory Gadebois parfait dans le rôle. Lambert Wilson, lui, vieillit bien. Il est champion sportif, patron de l’année, séducteur et court après le temps. Multi talent, comme Gadebois dans un tout autre style, il a créé un site de rencontres mais souffre de la solitude. Une version adaptée de Bernard Tapie. Chacun excelle à sa manière mais ment aux autres parce que le mensonge commence par soi.

Le temps et la rencontre

Les choses, « plus tu passes de temps à les fabriquer, plus elles te ressemblent. » «  Il faut montrer ce qu’on ne voit pas pour en souligner l’intérêt. » Il faut prendre le temps de s’apprivoiser pour apprivoiser les autres. Apprendre à ne plus dissimuler ou jouer pour être véritablement soi. La rencontre va peu à peu changer nos deux personnages, les transformer, les révéler.

Un film en forme d’ouverture

Lorsqu’une œuvre « fonctionne », elle ouvre les neurones du spectateur. On peut voir passer dans Les choses simples la Statue de la Liberté transformée en éolienne. Retrouver une tirade de Cyrano. Voir danser Fred Astaire. Et au milieu coule une rivière fait mouche. Certains plans rappellent joyeusement le précédent film d’Éric Besnard, Délicieux. Les valseuses concluent la fable : «  On n’est pas bien là.. ? » Et puis une adolescente y porte le nom d’une voiture électrique !

Simplicité n’est pas simplisme

Puisque de nourriture il est question, aussi bien dans Les choses simples que dans Délicieux, citons Curnonsky : « En cuisine comme dans tous les autres arts, la simplicité est le signe de la perfection » Il est difficile de parvenir à la simplicité. Il faut accepter de se livrer tel que l’on est pour y parvenir. Sans artifice. Peut-être la forme la plus élevée de l’écologie ?

Être «  relié »

On peut alors être relié à soi, au monde, aux autres. Être ce que Talpa adore : un oxymore sur pattes, autodidacte et pensée en arborescence. À la fois rat des villes et rat des champs, ambassadeur de Sparte à Athènes établissant toujours de nouvelles correspondances pour parvenir à «  se baigner dans le ciel. » Devenir poète : celui qui fabrique en se fabriquant. Éric Besnard poursuit le chemin pris avec Délicieux. Il y réunissait les couches sociales, le ciel et la terre, le noble et le roturier. Les choses simples réunissent la fidélité et l’accomplissement de soi, la présence et l’absence, toutes les temporalités.