« Leurs enfants après eux », création théâtrale à Thonon

« Leurs enfants après eux », création théâtrale à Thonon

26 novembre 2021 Non Par Paul Rassat

Ce 23 novembre 2021, la compagnie Demain dès l’aube, dirigée par Hugo Roux, proposait son adaptation sur scène du roman de Nicolas Mathieu. Le titre en est tiré de la Bible  « Il y en a d’autres dont le souvenir s’est perdu; ils sont morts et c’est comme s’ils n’avaient jamais existé, c’est comme s’ils n’étaient jamais nés et de même leurs enfants après eux ». Nous rejoignons aussi l’Éternel retour de Nietzsche ou cette vision antique du temps se déroulant de façon cyclique plutôt que linéaire. Et puis, peut-être, ce conditionnement psychologique et social nourri de schémas préétablis qui tracent nos destinées. La Boétie et sa servitude volontaire ne sont pas si loin. Nicolas Mathieu, répondant à une question, précise qu’il y a cependant de la lumière en nous. Cette part de liberté à partir de laquelle s’exprime, entre autre, l’amour.

Échange avec le public de La Maison des Arts du Léman

Quelques notes, prises à la volée, donnent un aperçu de l’échange entre Thierry Macia, directeur des lieux, Hugo Roux et Nicolas Mathieu avec les spectateurs

 Nicolas — C’est moi qui ai conçu ces personnages. J’y ai mis beaucoup d’amour. Les avoir vus exister sur ce plateau était si vivant ! Ça m’a secoué. Ça valait 9 heures de train ! (rires et applaudissements).

Thierry — Nicolas Mathieu vient de Nancy, c’est un peu loin.

Nicolas — Une représentation à New York aurait été plus simple.

Un nouveau départ

Hugo Roux — Cette première a été un moment très émouvant.  Il marque aussi le début de l’association avec la Maison des Arts. Thierry Macia accueille la compagnie pour plusieurs années.

Répondant à une question qui évoque une première adaptation de son roman, Nicolas Mathieu précise :

— À Bussang le parti pris n’était pas le même. C’est ce qui est passionnant. L’approche était axée sur l’adolescence, les rapports amoureux, les corps… Là, on a les trajets de tous les personnages. Ce que j’essaye de rendre dans mon travail, c’est le passage du temps. Hugo a réussi à le rendre en deux heures, sur scène. C’est un exploit. On voit ces gens qui vieillissent, qui grandissent. Le temps les détruit, les sentiments évoluent.

Photo haut droit : Thierry Macia, Hugo Roux, Nicolas Mathieu

Vision kaléidoscopique

Hugo — Nous avons fait le pari de rendre ce kaléidoscope, un concentré de vie. Nous avons essayé, tant bien que mal, de tenir les rênes des différents parcours, de montrer leurs interactions. L’approche ne pouvait pas être celle du livre. Il fallait toucher le spectateur autrement. Lui laisser de la place de se raconter lui-même les passages que nous n’avons pas choisi de représenter. Le roman montre un cycle éternel, qui ne s’interrompt jamais. Ce sont les mêmes acteurs qui jouent plusieurs générations. D’où un travail nécessaire sur les corps, sur les voix. Nous avons fabriqué les personnages avec des costumes, des perruques mais les liens parents/ enfants s’en trouvent renforcés. La musique est très présente à l’origine dans le roman. Elle participe à la cohérence de l’ensemble. Nous avons réalisé que, sur 1 heure 50 de spectacle, 1 heure 30 comporte du son.

Notre part de liberté

Talpa avait déjà rencontré Hugo Roux. Sa compagnie était en résidence à l’Auditorium de Seynod, cette écloserie tenue alors par Joseph Paléni. L’exil sur les rives du Léman et l’accueil chaleureux de Thierry Macia continuent le parcours. Il est amusant de noter que ce spectacle est une création…qui renvoie très très indirectement à une autre Création via la Bible et la citation qui en est tirée. Le roman et la pièce explorent l’étroite part de liberté qui nous anime et fait de chacun une création.