Marche

Le charme de la marche est inépuisable. Les philosophes en vantent les mérites. Les pieds en mouvement activent les neurones et la comprenette. Il y a certainement une action bien concrète, physique et géographique de la marche sur l’esprit. Sorti de sa tour d’ivoire, le penseur pénètre dans le vrai monde, s’immerge dans la vraie vie. Il n’est plus face à la réalité mais dedans. Et puis il lui faut encore davantage quitter sa tour d’ivoire maintenant que la vente de celui-ci est interdite. ( La chaussure a été réalisée par Franz Schimpl)

Les marches

Tentons de ne rater aucune marche. La sportive laisse-t-elle le temps de penser ? Il est possible de penser que non, à voir l’état des compétiteurs à l’arrivée. La marche spirituelle, à défaut de mener toujours à Rome mène souvent à Compostelle. Plus que de la pensée, elle susciterait une forme d’élévation de l’esprit. Les journalistes sont invités à la pratiquer afin de mieux maîtriser l’art de la coquille.

La marche politique

La marche politique fut une tentative récente de réunir toutes les forces vives. Las ! Les marcheurs étaient équipés de vulgaires godillots auxquels on les réduisait aussi bien du côté du pouvoir que dans le regard du bon peuple. Godillots, béni-oui-oui, pas de quoi faire avancer quoi que ce soit.

La marche philosophique

Les péripatéticiens furent ces philosophes qui enseignaient en marchant. Peut-être ne disposaient-ils pas de salles idoines équipées de tableaux numériques. Ils préféraient sinon le contact avec la nature, allez savoir. Et comme dans tout processus émanant de sociétés patriarcales, le terme péripatéticien passant au féminin vit son interprétation dévalorisée. Les péripatéticiennes font le trottoir pour attirer le client. Certains pensent que leur pratique relève de la philosophie.

Le marché des marches politiques

Retour en politique. En Marche, phénix né de ses propres cendres électorales, est devenu Renaissance. Les députés issus de ce parti ont été priés d’adopter une allure plus sportive. Lorsqu’ Emmanuel Macron aura accompli ses deux tours de piste, vers quels horizons marcheront-ils ? Certains prédisent un grand rassemblement sportif. D’autres la reconquête de nouveaux espaces en une forme de grand remplissement. Ailleurs on prône la déconstruction des allures adoptées jusqu’ici. La Nouvelle Union Politique et Sociale cherche encore son rythme.

La marche pour la liberté

Le charme de la marche n’est-il pas dans la liberté qu’elle apporte ? Voir Rousseau ( Jean-Jacques) à ce propos. « Je ne conçois qu’une manière de voyager plus agréable que d’aller à cheval, c’est d’aller à pied. On part à son moment, on s’arrête à sa volonté, on fait tant et si peu d’exercice qu’on veut. On observe tout le pays: on se détourne à droite, à gauche: on examine tout ce qui nous flatte, on s’arrête à tous les points de vue. Aperçois-je une rivière, je la côtoie; un bois touffu, je vais sous son ombre; une grotte, je la visite; une carrière, j’examine les minéraux. Partout où je me plais, j’y reste. À l’instant que je m’ennuie, je m’en vais. Je ne dépends ni des chevaux ni du postillon. Je n’ai pas besoin de choisir des chemins tout faits, des routes commodes; je passe partout où un homme peut passer; je vois tout ce qu’un homme peut voir; et, ne dépendant que de moi-même, je jouis de toute la liberté dont un homme peut jouir. »

Progression et régression

La marche est traditionnellement tournée vers l’avant. Notre époque a cependant inventé le rétropédalage. Si tu rétropédales pendant que le monde avance, tu fais du surplace.