Politique : refonder le discours

Politique : refonder le discours

24 avril 2022 Non Par Paul Rassat

La dissociété, de Jacques Généreux, date de 2006. Il y était question de refonder le discours politique. Proposition encore plus pertinente seize ans plus tard !

Culture et pensée modernes

« La pensée matérialiste moderne ne pouvait pas s’installer en anéantissant la pensée spiritualiste traditionnelle, car rien ne peut grandir si on en détruit les racines, et personne ne s’expose délibérément à l’incompatibilité frontale entre sa pensée et l’ensemble des croyances qui l’ont constitué en être pensant. La culture moderne s’est donc installée en douceur, en rusant avec les interdits, les tabous et les mythes hérités du passé, en conservant une structure de pensée familière, et de ce fait rassurante, sur laquelle pourraient grandir les idées nouvelles de l’individu, de la liberté, de l’autonomie, du changement, du progrès. »

L’accoutumance au progrès et la vie hors sol

Jacques Généreux pointe alors une erreur de cette pensée moderne qui entraîne une accoutumance au progrès. Talpa y ajoute la confusion entretenue entre changement et progrès. « Ajoutons à cela le fait que les idées simples avancent plus vite que les idées complexes…il se peut que la lutte contre une idée fausse nécessite, dans un premier temps, une présentation simpliste (voire erronée) d’une idée différente pour en faciliter l’assimilation. Aucun chemin réussi vers la connaissance ne fait l’économie d’un entraînement de l’esprit sur des objets trop simples pour être tout à fait « vrais ».

 La recherche d’un progrès à flux tendu nous coupe de toute prise avec une réalité qu’on nous demande désormais de regarder en face. Oubliant que nous en faisons partie. Les véritables liens avec elles ont été largués comme des amarres. En immersion (expression à la mode) dans le court terme, nous confondons les moyens avec les fins. « L’idée, c’est de… » dit-on partout. On confond ainsi l’imagination, la conception avec l’objectif. Il suffit d’avoir une idée pour qu’elle soit opérationnelle. Ou bien de « faire en sorte que… » Le court terme se contente de l’idée ou bien de la possibilité. L’efficacité importe moins.

Grandir enfin !

« L’urgence n’est plus d’émanciper les individus contre un surmoi social (moral ou religieux) aliénant….l’individu moderne est parfois tellement émancipé de tout sens imposé de l’extérieur qu’il souffre du non-sens, de la nécessité d’être tout à lui tout seul-bref, de « la fatigue d’être soi » qui le plonge dans la dépression. L’urgence est de grandir : quitter l’enfance de la pensée moderne pour accéder à une pensée adulte et consciente ; cesser de refouler et de maquiller tous les faits qui dessinent une humanité plus complexe que le schéma d’écolier sur lequel on s’entraîne depuis trois siècles. » Il serait donc temps de refonder enfin le discours politique !