Propriété, langue, grand remplacement

Propriété, langue, grand remplacement

6 février 2022 Non Par Paul Rassat

Il est intéressant de constater que la marche vers un univers virtuel s’accompagne de la nécessité d’appuyer sur la dimension concrète de certaines de nos actions. Sans doute afin d’éviter le « Tu causes, tu causes, c’est tout ce que tu sais faire » de la Zazie de Queneau. Il a fallu poser des actes forts, utiliser le verbe impacter, dénoncer les paroles verbales. La tendance est actuellement à faire sien. « Dans la situation qui est la mienne », « avec les idées qui sont les miennes ». Pour être bien certain que l’on existe concrètement le recours à la sainte trinité s’impose «  Moi, perso, je… » Si l’on mêle la mondialisation au virtuel, il faut aussi insister sur la notion de propriété. Quelques expressions y contribuent.

Accaparer, s’accaparer

«  Dans le domaine de l’écon. Accumuler, à des fins spéculatives et au détriment d’autres ayants droit, des produits ou des valeurs de première nécessité…

2 traits se constatent à travers tous les emplois de accaparer : a) quel que soit l’obj. accaparé (marchandises, valeurs, obj. divers, choses abstr., pers.), accaparer signifie que l’on prend le plus possible; b) l’action d’accaparer se fait ordin. au détriment de qqn. D’où la nuance péj. Dans l’usage litt. le 2e trait peut cependant manquer ou rester dissimulé. » (TLFi).

S’approprier

Dans un premier temps, ce verbe signifie «  adapter à un usage particulier ». À la forme pronominale, il devient « s’emparer de, faire sa propriété », qui nous mène à « se saisir de : se saisir d’une femme, posséder une femme. »  Et c’est ainsi que la résistance au virtuel n’est pas forcément platonique.

Quand l’estimation devient évaluation

Un intellectuel parlait récemment à la radio de « familles à très faible capital culturel ». C’est que l’on consomme de la culture, du temps de parole. On consomme et on consume.

Concrétisation géographique

Talpa a déjà abordé la nécessité de localiser quelque chose afin de ne pas être totalement hors sol dans ce monde qui se virtualise. Alors « On est sur une logique de… » « On est là sur une biathlète qui est expérimentée. » La travailleuse du sexe n’est pas loin !

Le grand remplacement

Alors que certains dénoncent le risque d’un grand remplacement que rien n’étaye, un autre remplacement est depuis longtemps installé. On mesure parfois les difficultés que nous impose le dollar comme monnaie de référence mondiale. Il semblerait que nous ayons renoncé à défendre notre langue contre l’invasion mondiale de l’anglais qui finit par modifier notre mode de pensée. « On va créer un wellness center à l’hôpital, un centre de bien être » déclare un médecin. «  Vous êtes boomer ? » demande ce journaliste qui enchaîne ensuite en quelques instants avec wokisme et cancel culture. Ne serions-nous pas dans un grand effacement de notre langue ?