Tranquillement

Tranquillement

1 mars 2024 Non Par Paul Rassat

Ce mercredi 28 février, la police veillait en la bonne ville d’Annecy. Sûr de son bon droit, un véhicule de la police nationale roule tranquillement sur la chaussée. À bord, quatre policiers. Afin d’assurer cette continuité indispensable au service public, le véhicule de la police ne s’arrête pas au stop qui assure la sécurité de la circulation à la sortie du parking dont il sort. Ni sirène, ni gyrophare. Ce train tranquille de la force sûre d’elle-même. Nous nous retrouvons sur deux files voisines au feu suivant. Je fais remarquer au policier installé sur le siège passager que leur voiture a brûlé un stop.— «  Oui ? ». Qu’il n’avait ni gyrophare, ni sirène. — «  Ah bon ! ». Qu’il devrait changer de lunettes s’ils n’ont pas vu le stop et qu’ils se doivent de respecter ce qu’ils exigent des autres.

Terrible culpabilité masquée

La situation des policiers est très inconfortable. Il n’a pas été prévu qu’ils puissent s’infliger une amende à eux-mêmes. Ils sont donc obligés d’afficher une royale indifférence afin de cacher cette gêne qui ronge de l’intérieur leur saint ministère. Vous rendez-vous compte ? Les forces de l’ordre en plein désordre et ne pouvant s’autopunir ! Les voici obligés de maintenir une forme de cohérence dans leur conduite automobile et personnelle. Circulation sur deux voies, non respect de la limitation de vitesse s’enchaînent afin de ne pas désavouer leur manquement précédent. Les quatre policiers poursuivent tranquillement, en apparence, leur mission sacrée de maintien de l’ordre. Mais au fond d’eux-mêmes un terrible sentiment de culpabilité doit les ronger. Je m’en veux d’avoir renforcé ce malaise inhérent à la condition du policier qui doit sévir dans la rude ville d’Annecy et y montrer l’exemple.

Ruminations

Le véhicule de la police longe maintenant le Pâquier dont le nom ouvre sur des ruminations que l’uniforme suscite. Et comme  » Bis repetita placent », rebelote ce jeudi 29 février, avec une voiture de police municipale cette fois-ci. Ceci confirme donc cette pratique dont on peut penser qu’elle est aussi ancrée territorialement que la consommation de raclette.

Un peu de Hugo ne fait jamais de mal

« Je suis une force qui va ! Agent aveugle et sourd de mystères funèbres ! Une âme de malheur faite avec des ténèbres ! Où vais-je ? Je ne sais. Mais je me sens poussé / D’un souffle impétueux, d’un destin insensé. Je descends, je descends et jamais ne m’arrête. »

                                        Victor Hugo  Hernani