Violences policières : un oxymore ?

Violences policières : un oxymore ?

22 octobre 2020 Non Par Paul Rassat

L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui.

Pierre Desproges

Il en va de même avec la notion de violence qu’avec celle d’ennemi.

Logique !

Rappelez-vous quelques notions de mathématiques comme la transitivité :

Si a=b et b=c, alors a=c

Ce type de raisonnement donne, en matière de logique, le syllogisme.

Le plus connu ?

Tous les hommes sont mortels.
Socrate est un homme.
Donc Socrate est mortel.

L’un des plus réussis ?

Plus il y a de trous,
moins il y a de gruyère.

Plus il y a de gruyère,
plus il y a de trous.

Donc plus il y a de gruyère,
moins il y a de gruyère.


Ayons recours à ce mode de raisonnement dont la logique est imparable, Monsieur Christian Jacob affirme que les violences policières en France n’existent pas.
or elles existent,
donc la France n’existe pas.

Ou bien Monsieur Christian Jacob n’existe pas,
ou bien encore Monsieur Christian Jacob n’a rien dit…

Un peu de sémantique

Quand j’entends le mot violences policières, personnellement, je m’étouffe […]

M. Gérald Darmanin en août.

Notons que le verbe étouffer utilisé à la forme pronominale « je m’étouffe » ne nécessite pas l’emploi de l’adverbe personnellement car il est difficile de s’étouffer quelqu’un d’autre que soi ; à moins que l’emploi de cet l’adverbe ne constitue un moyen de se rassurer et de se prouver sa propre existence. Un ministre de l’Intérieur devrait se prouver qu’il y a quelqu’un à l’intérieur de sa personne ! (Il est patent que le sus passage est lourd syntaxiquement, mais comment parler d’étouffement avec légèreté ?)

Le serment prêté par les forces de l’ordre peut éventuellement contribuer à comprendre la notion de violences policières :

Je jure d’obéir à mes chefs en tout ce qui concerne le service auquel je suis appelé, et dans l’exercice de mes fonctions, de ne faire usage de la force qui m’est confiée que pour le maintien de l’ordre et l’exécution des lois.

Serment des Policiers et Gendarmes d’active
Graffitis sur un mur d'Ajaccio
Des graffitis sur un mur d’Ajaccio

Ordre

« Ceux qui s’en prennent aux forces de l’ordre, aux élus, ne passeront pas. »

Emmanuel Macron  le 4 septembre 2020

Dans cette allocution, le chef de l’Etat oppose la loi à l’arbitraire. Livrons-nous à une analyse linguistique de cette formule : le dictionnaire du CNRS en ligne nous donne les sens possibles du mot « ordre ».
En voici un résumé.

I)
A – disposition, relation intelligible entre les choses.
B – disposition, succession régulière, constatée ou constituée.
C – organisation satisfaisante et rationnelle.
D – ensemble de règles, de lois.

II)  Classification

III) Commandement, injonction.

Nous passons ainsi  d’une relation intelligible entre les choses à l’injonction par glissements progressifs non pas vers le plaisir mais vers une rigidité qui nous renvoie à la notion d’entropie, dont le TLFi nous dit que c’est « une grandeur thermodynamique exprimant le degré de désordre de la matière ». Le niveau le plus bas de l’entropie pourrait correspondre à l’état de cadavre, à l’absence d’échanges des matières et des gaz, à ne pas confondre avec les gaz lacrymogènes.  

Sans aller jusqu’à soutenir que le désordre constitue la vie, celle-ci doit comporter une part de désordre qui permette l’espace, le jeu propice à l’épanouissement de cette « relation intelligible entre les choses » et à un équilibre entre toutes les acceptions possibles du mot « ordre »

Les forces de l’ordre. De quel ordre parmi les six possibles ?

Il faut être précis pour que ce ne soit pas du grand n’importe quoi. Dans la bouche de certains « les forces de l’ordre » constitue un pléonasme, une tautologie donc une notion indiscutable.

Il faut aussi relever « ne passeront pas. » Rappel singulier du « No pasarán » des forces républicaines espagnoles contre les franquistes… qui gardèrent le pouvoir de 1939 à 1975.

La « guerre » contre le virus, le provocateur « qu’ils viennent me chercher », et maintenant « ils ne passeront pas » ne relèvent-ils pas trop du domaine de l’affrontement militaire ?

L’ordre devrait être une perpétuelle recherche d’équilibre et non un affrontement.

Il est intéressant de revenir au serment prononcé par les agents des forces de l’ordre. Il est courant de penser qu’une personne assermentée est tenue de dire la vérité ; or ceci n’apparaît pas dans la formule consacrée. Le plus souvent, la parole d’une personne assermentée prime cependant sur celle d’un autre individu bien que le serment prononcé ne semble pas le justifier.

On pourrait même objecter qu’un serment soumet celui qui le prononce à davantage de contraintes, de rigueur qu’un autre individu et  n’auréole pas systématiquement ses propos du sceau de la vérité.

L’ordre et la loi

Amusons-nous enfin d’une formule dont le sens s’impose à tous « Nul n’est censé ignorer la loi ». Pourquoi ne pas en actualiser et en renforcer le sens ? Pourquoi ne pas comprendre « La loi doit être accessible à tous, être formulée de façon simple, être expliquée plutôt que portée par un jargon qui permet aux « spécialistes » de vivre à ses crochets, aux magistrats et autres d’en tirer pouvoir ? »

Conclusion ?

Après l’invention de l’accouchement sans douleur, on répondait aux parturientes se plaignant de souffrir que ce n’était pas possible… puisque l’accouchement était labellisé « sans douleur ».

Des carreaux vandalisés
Se tenir à carreau

Comment les forces de l’ordre pourraient-elles se livrer à des violences puisqu’elles font, par définition,  appel à la force pour défendre l’ordre et la loi que nul n’ignore ?


Précision : ce texte n’est en aucun cas une invitation à ou bien une justification de la violence.