Surprise

Surprise

29 février 2024 Non Par Paul Rassat

Surprise «  — Action de prendre quelqu’un; fait d’être pris…Fait de gagner artificieusement la confiance de quelqu’un, d’abuser de sa bonne foi…À l’improviste, avec soudaineté…Chose qui surprend; ce qui provoque l’étonnement. » Le dictionnaire indique donc que la première signification de la surprise n’était pas de surprendre au sens où on l’entend aujourd’hui. Au XII° siècle, la fameuse surprise était même un impôt ! L’émission de télé « Surprise sur prise » était bien nommée. Lors d’une conférence de presse qui suivait de peu l’élection de François Astorg à la mairie d’Annecy, une journaliste remarqua «  C’est une surprise à laquelle vous ne vous attendiez pas ». Elle parlait de l’état d’installations sportives. Personne ne sembla surpris par la formulation de cette remarque pléonastique.

Montesquieu

Dans son Essai sur le goût, Montesquieu écrit : « Ce qui fait les grandes beautés, c’est lorsqu’une chose est telle que la surprise est d’abord médiocre, qu’elle se soutient, augmente, et nous mène ensuite à l’admiration…Il arrive souvent que notre âme sent du plaisir lorsqu’elle a un sentiment qu’elle ne peut pas démêler elle-même, et qu’elle voit une chose absolument différente de ce qu’elle sait être ; ce qui lui donne un sentiment de surprise dont elle ne peut pas sortir. » Suit l’exemple du dôme de Saint-Pierre, « une masse en même temps si énorme et si légère. » Michel-Ange avait réussi son «  en même temps » !

La surprise d’Andrea Marcolongo

La surprise est donc l’opposé de l’évidence. Andrea Marcolongo écrit d’elle : « Surprendre. Autrement dit, je te prends par l’étonnement. Et je t’emporte avec moi. La surprise n’est pas un mot innofensif : son étymologie vient du verbe prendere, « cueillir », « attraper », « capturer », avec l’ajout ( aggravant ) du préfixe sur-…Cueillir par surprise, dit-on souvent, comme s’il s’agissait d’une fleur. »

L’évidence et la surprise

L’évidence est, elle, étymologiquement la possibilité de voir, la clarté, la transparence. On pourrait même imaginer que l’évidence est vide, tellement elle est évidente. À l’opposé de la surprise qui se développe en nous emportant. Il semblerait que notre société recherche davantage l’évidence indiscutable mais creuse que la surprise. Une évidence émotionnelle que l’on «  partage » aussitôt et qui tient lieu d’eucharistie.