« Maigret » de Patrice Leconte et Gérard Depardieu
28 mai 2022Un bon polar est une enquête sur l’enquêteur. L’un des sommets fut atteint voir l’octosyllabe ci-dessous) en ce domaine par Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon. Ce Maigret est plus discret. Le portrait du commissaire s’y trace en creux. D’autant plus qu’il est peu bavard. Il se contente d’observer et d’écouter. Une véritable enquête de sens.
Une silhouette en carapace
La masse corporelle de Gérard Depardieu tient le rôle du commissaire. La voix, le regard, la profonde compréhension des autres lui donnent dimension totalement humaine.
Maigret, un témoin de son temps
Ce Maigret révèle son époque. Le film peut décevoir les amateurs de sensationnel, d’effets spéciaux. L’essentiel s’y devine plus qu’il ne s’impose. S’y chevauchent les reconstitutions d’une époque, d’une histoire, de l’identité de la victime et de l’identité de l’enquêteur. Le décor, très soigné, fait décor de théâtre. Théâtre de la mise en scène des relations humaines. Car tout ici est affaire de relations, de rapports humains. On se rencontre, on se déplace. Pas d’ADN, d’empreintes, d’informatique. Le temps est celui des vies qui s’entrecroisent. La prise de vue très resserrée vaut par le hors champ sur lequel elle ouvre en permanence. Dialogue du gros plan et du hors-champ.
Du gros plan au gros plant
Peu loquace, Maigret nous lâche cependant un octosyllabe ciselé « La jeune fille prendra la tatin. » Ou bien cet éclairage sur la tonalité d’une enquête « Il y a des enquêtes au blanc comme il y a des enquêtes au calva ou à la bière. » Celle-ci est une enquête au blanc qui met en lumière une figurante de la vie, un très second rôle. Et puisque de gros plan il est question, on s’amusera de cette statue d’ours dont le profil en gros plan semble évoquer la représentation d’un désir.
Du désir à l’amour
On a beaucoup polémiqué autour des relations de Depardieu et de Poutine. Elles offrent apparemment un arrière plan handicapant pour le film de Patrice Leconte. Talpa ne prend pas parti mais a signalé la déclaration d’amour que Depardieu fait à la France dans le dernier Jérôme Commandeur. Son incarnation de Maigret est une déclaration d’amour à la vie. Et, bien au-delà, dns ce film l’essentiel est le non dit.
À creuser…