Annecy Rando Nature

Randonner, « courir impétueusement (en parlant d’un animal tentant d’échapper au chasseur) ». Sans doute de l’allemand rennen, qui flirte avec l’anglais run… La randonnée est devenue une « promenade longue et ininterrompue. Si l’animal, ça se comprend, tente d’échapper au chasseur, à quoi tente d’échapper le randonneur ? Que lui apporte Annecy Rando Nature ? Rencontre avec Laurent Dollet pour en discuter.

L’association

Nous sommes un syndicat privé composé de six indépendants qui fonctionnons avec un programme commun.  La même polyvalence anime le groupe bien que nous venions d’univers différents. Ingénieur, technicien forestier, passage par la restauration, coach sportif… chacun a eu un parcours différent. Ce que nous avons en commun, en revanche, c’est notre formation d’accompagnateurs en montagne ; d’où notre polyvalence pour la raquette, la marche nordique et d’autres types d’activités destinées à des publics différents.

Les plus

Vous allez de la marche nordique aux séminaires. Y-a-t d’autres activités à développer ?

La marche en tant qu’activité régulière toute l’année n’existe pas dans les clubs fédéraux. Nous sommes apparemment les seuls à proposer la randonnée toute l’année. Le système de cartes que nous avons mis en place permet de pratiquer à un tarif abordable. La rando doit être démocratique et ne doit pas s’adresser uniquement à des touristes qui ont de l’argent.

La motivation

Quel type de pratiquants visez-vous ?

Ceux qui viennent marcher sur nos randonnées collectives sont à 95% des locaux. Ces gens nous connaissent depuis des années parce que nous avons eu un passé avant de lancer Annecy Rando Nature. En plus de nos compétences d’accompagnateurs, nous leur apportons ce déclic qui les convainc de pratiquer régulièrement cette activité. Ils savent que « le dimanche, c’est rando ». Sinon, entre amis, on hésite s’il pleut, s’il y a une contrariété… Les gens qui s’inscrivent chez nous viennent réellement marcher.

La convivialité

S’ils se sentent tenus de randonner, il faut que l’activité se pratique dans une ambiance qui fasse oublier les contraintes de cet engagement.

La convivialité est là ! Bien sûr, il y a la contemplation, le plaisir de faire découvrir des endroits, mais le pique-nique est un moment très important. On choisit un bel endroit pour passer un bon moment. Chacun ramène du chocolat, une bouteille à partager.

S’adapter

Votre pratique permet de s’adapter à l’environnement, parce qu’il faut le connaître pour s’y adapter. Vous-mêmes, vous vous adaptez à vos différents publics. Vous devez toujours être en évolution, à l’écoute, à la découverte ?

Nous sommes un peu des médiateurs en ce qui concerne l’environnement et la nature. Les gens qui marchent ne verront pas forcément ce que nous voyons et sommes capables d’expliquer. La marche ne doit pas être stérile, il faut sortir grandi de la randonnée. Il est vrai que nous devons nous adapter à nos différents publics. Avec Cran-Gevrier, c’est une tendance MJC, très sociale. Ils sont déjà contents de longer le lac en mini bus. On ne va donc pas chercher la performance mais plutôt le temps d’un moment partagé. Il peut y avoir parfois des surprises quand les gens ont une perception erronée de leur niveau. Il arrive que l’équipement ne convienne pas, bien que tout soit spécifié avant le départ. Nous devons soit épauler, soit dire carrément non parce que les conditions de sécurité ne sont pas respectées.

Les centres d’intérêt

Vous traitez de la faune, de la flore, de géographie, de géologie, de toponymie et de pastoralisme. Quelle est l’importance du pastoralisme ? Pourquoi en parler à vos randonneurs ?

Le pastoralisme est la forme de cohabitation entre l’homme et la nature. C’est grâce à lui que des gens ont pu vivre en montagne, avec la montagne. Il a contribué à préserver des milieux, il n’y aurait sinon que de la forêt partout. Il est préférable d’avoir des mosaïques de paysages.

Une équipe soudée, de partenaires différents

Votre approche de la randonnée et de la nature exige que vous vous formiez en permanence. Vous avez votre diplôme d’accompagnateurs mais, comme nous l’avons signalé plus haut, vous vous adaptez en permanence, aux gens, à la nature, aux nouvelles connaissances.

Après la formation, chacun de nous six va enrichir son savoir en fonction de son passé, de son expérience, de ses centres d’intérêt personnels. Quand on est passionné, on apprend tout le temps, et aussi avec les clients. Une prof de SVT devient une collaboratrice : c’est un enrichissement mutuel.

Vous traitez des plantes et de la gastronomie ?

Oui, on retient davantage une plante lorsque l’on souligne ses vertus, l’origine d’un nom qu’en la nommant simplement. Il est nécessaire de l’inscrire dans une histoire.

Une passion commune

Au fond, qu’est-ce qui vous réunit tous les six, vous, Laurent, Brice, Fabien, Jean-Jacques, Yoann et Antoine ?

Une passion commune de la montagne qui se décline à travers différentes facettes. Certains collègues sont davantage tournés vers la performance, d’autres sur le relationnel, la convivialité. Nos randonneurs peuvent choisir dans l’éventail d’approches, de difficulté.

La curiosité comme moteur

Beaucoup de Savoyards pensent connaître l’environnement, le territoire. C’est bien qu’ils dépassent certains clichés grâce à vous.

Je suis savoyard d’adoption. C’est la passion qui m’a permis de découvrir réellement la montagne. Un client m’a dit un jour que je méritais d’être Savoyard ! Mais mon parcours personnel et  le fonctionnement d’Annecy Rando Nature font que, contrairement à certains pratiquants locaux, j’ai plaisir à découvrir toujours de nouveaux parcours, de nouveaux horizons à faire découvrir à nos fidèles.

Un peu d’humour

Pourquoi ne pas terminer par une ou deux anecdotes ?

Nous passions par le refuge Bonatti, en Italie. Dans la check list, j’avais demandé « un sac à viande ». L’un de nos clients, Benjamin, m’a sorti un sac à jambon. Il ne savait pas ce qu’est un sac à viande ! Les réflexions d’enfants sont intéressantes. Sur un banc était gravé « ONF ». J’ai demandé s’ils savaient ce que ça signifie. Réponse :  «  On a faim ! »

Vivre avec…

La convivialité est la relation à l’environnement. Cum vivere, vivre avec. Pourquoi l’humour n’en ferait-il pas partie ? C’est le moment de répondre à la question posée au début de ce texte. La randonnée version Annecy Rando Nature semble permettre d’échapper au conditionnement, aux habitudes afin d’unir le corps et l’esprit dans un même élan de découverte, de connaissance et de partage.