Du champ à l’assiette

Du champ à l’assiette

14 septembre 2023 Non Par Paul Rassat

Le dimanche  3 septembre 2023 se tenait un événement très significatif dans le jardin du Clos des Sens. Un soutien au maraîcher Hadrien Corneille, une rencontre, un croisement d’expériences humaines. Un truc vraiment bien à tous points de vue intitulé «  Du champ à l’assiette ». Du producteur au consommateur via la conversation, la dégustation, le temps de la découverte. ( Photo, Franck Derouet et Hadrien Corneille)

Conversation avec Franck Derouet

Nous avions organisé durant le confinement Le Marché des Producteurs. Les gens du quartier, ceux qui nous connaissent venaient faire leurs achats auprès des producteurs avec lesquels nous travaillons. C’était comme un petit marché. Cette initiative maintenait la cohésion entre les équipes, entre Le Clos des Sens et les producteurs, les artisans et avec nos clients ou d’autres. Le succès a été important parce que nous entretenions les liens sociaux.

De l’importance des liens humains

L’idée nous est restée d’organiser un marché des producteurs au moins une fois par an. Aujourd’hui, c’est différent. Hadrien est notre maraîcher. Sa production a été touchée par la grêle et nous avons souhaité l’aider, toujours en tissant des liens humains. Cet événement réunit d’autres professionnels de la restauration qui travaillent avec Hadrien. C’est l’occasion d’accueillir tous ces gens en ouvrant notre jardin. Nos visiteurs goûtent aux préparations culinaires qui leur sont proposées et une participation libre, au chapeau, est reversée à Hadrien. J’espère que ce sera l’occasion de rencontres, d’échanges.

« On s’apprend »

Rencontres, échanges : vos producteurs sont choisis pour la qualité de leurs produits mais aussi pour des raisons humaines. Bien sûr. La proximité de pensée est importante. La principale source d’inspiration qui nous guide au Clos des Sens est la rencontre avec les gens. Que ce soit Jean-Pol Bozzone avec sa poterie, Hadrien… On discute, on s’apprend et de ceci naît une véritable histoire.

Échange avec Hadrien Corneille

Un événement qui m’est consacré ? C’est adorable mais il est le résultat d’une collaboration née il y a six ans. Nous avons toujours été très complices. J’ai commencé il y a six ans, comme Franck Derouet au Clos des Sens. Il a su me trouver sur les marchés grâce à mon stand de « petits légumes ». Je l’accueille dans les marchés ou dans les champs. Il me reçoit régulièrement au restaurant. Ceci correspond au besoin de faire travailler des gens installés à proximité.

La confiance

Oui, mais vous n’êtes pas le seul producteur local. Il doit bien y avoir un déclencheur particulier.

La confiance, la qualité des légumes. J’aime produire des légumes très petits, avec un goût assez juvénile. Je vends les légumes que j’aime davantage que comme le client pourrait les aimer. Ça nécessite des explications quant au temps nécessaire, à d’autres paramètres. Je ne vends que ma production. Elle est le reflet du terroir et de la saisonnalité du côté de Marcellaz-Albanais. Cette façon de faire correspond aux valeurs des chefs présents aujourd’hui au Clos des Sens.

Bousculer les habitudes

Vous aviez commencé l’aventure ici avec Laurent Petit, avec d’autres chefs. Les particuliers sont sensibles à votre démarche ?

J’aime à sensibiliser les gens, leur expliquer les saisons. En mai, par exemple, les tomates sont encore toutes petites. Je leur montre quelques plants pour qu’ils voient à quoi ils ressemblent. Je leur parle du climat, de la région, du terroir. Les gens peuvent toucher, sentir. Ça permet de bousculer un peu leurs habitudes et ça marche parce que les gens sont curieux.

Vous devez l’être vous aussi ?

Oui. J’aime énormément mon métier, je suis gourmand, ce qui crée une cohérence qui peut être déclinée de différentes façons par les maraîchers, par les chefs, par les particuliers.

Transformer ?

Pourquoi ne pas étendre votre champ d’action à un atelier de cuisine par exemple ?

Je pense à un atelier de transformation pour plus tard. Aujourd’hui elle se limite à un velouté de courgette, à des pickles de concombres. Pourquoi ne pas valoriser le produit directement sur l’exploitation en proposant de la restauration ? Notre réseau et nos complicités peuvent y aider. On retrouve cet esprit dans l’événement d’aujourd’hui qui s’appelle «  Du champ à l’assiette. » Le Cortil et le Clos des Sens conviennent parfaitement à cette approche de la production et de la restauration.

Hadrien, maraîcher organique

L’événement de ce dimanche doit vous faire chaud au cœur.

Je fais ce métier par passion. J’aime être seul dans mes champs. Mais je suis particulièrement sensible à cette initiative des restaurateurs qui me soutiennent dans un moment difficile. Ceci correspond à un nouvel état d’esprit chez les cuisiniers. Ils viennent faire le marché, ils ont une conscience du produit. Les quantités n’étant pas illimitées, ils s’adaptent. Le point commun entre les humains et les légumes, c’est le carbone. Je suis un maraîcher organique. Tous les êtres vivants ont besoin d’eau et de soleil.

Annecy est de plus en plus une ville de l’événementiel. À un autre niveau se tisse un réseau de complicités, de qualité profondément liées au terroir et aux personnes. C’est un travail plus en profondeur.

Nous sommes sur la durée. Les événements se créent spontanément parce que la relation est forte et durable.