Jean Sulpice — le chef,l’Auberge & le lac
5 février 2021Une identité
Jean Sulpice, identité, le chef, profession, l’Auberge, l’Histoire, & le lac, une histoire et un territoire. Tout est désormais indissociablement lié, se tient et se décline d’une touche à l’autre. Vous remarquerez l’emploi d’articles définis. Ce n’est pas une auberge, mais l’auberge ; pas un lac, mais le lac.
C’est qu’il faut de la personnalité et du tempérament pour investir les murs de l’Auberge du Père Bise qui a tissé des liens avec le territoire, avec la gastronomie, avec de grandes figures de l’Histoire. Jean Sulpice montre qu’il en a dans l’assiette et autour de l’assiette.
Une promesse affirmée
Le livre s’ouvre sur la photo d’une fleur d’ail des ours. Une promesse non pas en l’air mais attachée à la terre comme ses racines. Chaque plat proposé est une mise en abyme de la nature, celle-ci concentrée dans l’écrin, celui-ci au centre de la nature. Échange, conversation président à la conception de chaque réalisation.
Une histoire et un voyage
Un livre en deux services. D’abord le récit d’un parcours d’étapes en étapes ; les recettes ensuite, sans rien d’inutile. Juste le nécessaire. Le premier service ouvre des points de vue, franchit des cols, associe lac et montagnes en des paysages mentaux. S’en dégage une atmosphère à laquelle les photos donnent une dimension spirituelle toute de douceur. Les recettes constituent les itinéraires qui y mènent et qui permettent d’en garder ensuite souvenir et saveur.
Accords proches et lointains
Parmi les produits utilisés la modeste betterave voisine avec la carotte, le céleri, la blette, le radis ou la courge. Reblochon, perche, omble chevalier, féra, ail des ours, Beaufort ou Comté marquent le territoire. Celui-ci flirte avec l’Italie sœur qui lui apporte parmesan, polenta, trévise, mascarpone, noisettes du Piémont, brocoletti. Main de bouddha, cardamome, yuzu, cumin, curry, citron kabosu prolongent le voyage dont la tanaisie, le rumex, la livèche enrichissent l’horizon végétal. Et puis l’antésite vient ajouter sa touche proustienne, le voyage dans le temps. Quant à l’Oxalis, elle trace le chemin parcouru depuis l’établissement de Jean à Val Thorens.
Une maison, c’est un couple
C’est ce que nous déclarait Stéphane Buron rencontré sur les rives du lac. « On sait bien que derrière un grand chef il y a toujours une grande dame. » Nous discutions alors de Michel Rochedy, mais Stéphane Buron cita aussi Yoann Conte, Laurent Petit, Emmanuel Renaut et Laurent Bacquié. Ce livre rend hommage à la place qu’occupe Magali au côté de Jean.
On remarquera enfin que le patronyme Sulpice, du latin Sulpicius, est voisin de Sylvestre et nous ramène ainsi au monde de la nature et de la forêt. La boucle est bouclée et la baie de Talloires peut à la fois ouvrir sur le lac et enserrer l’Auberge de Magali et de Jean Sulpice.