Le sport, la compétition, le discours sportif, politique et les J.O
11 mai 2021Sport, jeu et compétition
L’activité sportive relève du gaspillage d’énergies. Lancer une pierre par simple jeu rejoint la dimension ludique indispensable à tout animal, donc à l’homme. Si à côté de moi quelqu’un lance sa pierre plus loin, le jeu se transforme en compétition. Celle-ci a des effets bénéfiques : progrès techniques, détournement de l’agressivité, de la force brute en intelligence, etc. Cependant la compétition transforme le jeu, en réduit les effets libérateurs et entraîne des dégénérescences comme « l’élevage d’êtres humains voués à la compétition »… La compétition devient aussi « un spectacle pour autrui, donc un jeu joué par d’autres et vu par moi. »
L’intérêt véritable du sport de compétition
Le sport vu par un autre devient un ersatz, un simulacre qui peut ouvrir à des émotions mais ne construit en rien celui qui est transformé en voyeur. D’autant plus qu’il s’accompagne du discours des médias sur le sport, qui engendre lui-même un discours sur les médias parlant du sport. Quel est-donc, dans ces conditions, le véritable intérêt du sport ? Purement économique. « …il est plus facile de faire courir un athlète que de réaliser un film avec des acteurs qui feignent de courir : la seule chose qui existe est le bavardage sur le bavardage sportif. » Il s’agit de tenir l’antenne, de construire du pseudo raisonnement au kilomètre. « …le bavardage sur le bavardage a toutes les apparences du discours politique. On y dit ce que les gouvernements auraient dû faire, ce qu’ils ont fait, ce qu’on voudrait qu’ils fassent…. »
Discours toujours
Le bavardage sportif devient discours politique. Il devient une fin en soi, un discours phatique ( Fonction phatique. Fonction du langage dont l’objet est d’établir ou de prolonger la communication entre le locuteur et le destinataire sans servir à communiquer un message. Définition donnée par le TLFi). Le discours finit par ne fonctionner qu’en boucle qui renvoie à lui-même. À cette petite absence de vrai jeu, la langue s’émousse, les mots perdent de leur pertinence. Il faut les renforcer. Poser des actes forts, qui impactent en parlant à de vraies gens. Mais il faut en même temps continuer d’occuper le terrain, délabyrinther sa pensée comme le demande Roxane à Christian dans Cyrano de Bergerac. Deviendrions-nous toutes et tous des précieuses ridicules ?
Inflation verbale
De quelques formulations au kilomètre entendues dernièrement
« Ils essayent de faire en sorte que… » Monique Canto Perber
« On est une activité où il y a pas mal de visites » Patron du parc Astérix
« Nous travaillons à nous mettre en situation de pouvoir proposer… »
« Il y aura d’autres contrats qui vont pouvoir nous permettre de nous couvrir… » Patrick Breton parlant de vaccin.
Et toujours les « Se donner les moyens de…être en capacité de … »
Impression de voir ces défilés de mode télévisés pendant lesquels les modèles marchent en boucle à l’infini, presque interchangeables. Et chaque fois le souvenir de ce dessin de Sempé. Une jeune femme accueille ainsi des écoliers à l’entrée d’un musée « Je vais vous montrer ce que vous allez voir. »
J.O « Citius. Altius. Fortius. Fricius »
Tout ceci est à mettre en relation avec cette décision concernant les Jeux de Tokyo. Il y sera interdit aux athlètes de protester sur le podium ou sur les terrains. La majorité des athlètes approuvent. Il s’agit, conformément à la charte olympique d’interdire toute « manifestation ou propagande politique, religieuse ou raciale. » Le sport de compétition ? Un esprit sain dans un portefeuille bien garni. Le Comité Olympique devrait communiquer dans les jours à venir les résultats de toutes les compétitions qui se tiendront par la suite à Tokyo. On espère empêcher ainsi toute surprise, tout débordement risquant de perturber le bon déroulement du spectacle.