Les écologies

Les écologies

17 août 2024 Non Par Paul Rassat

L’écologie existe au pluriel. Il faudrait dire les écologies. L’emploi singulier de notions qui soulèvent tant de polémiques ajoute à celles-ci. Les politiques, les économies, les cultures s’imposent alors que l’emploi au singulier de ces mots relèverait presque de l’abus de langage qui pourrait faire croire qu’il y a une recette ou une solution miracle et indiscutable dans chaque domaine.

Vision utilitariste

Dans un livre collectif, de la convivialité, Alain Caillé écrit :  «  …la conception utilitariste du monde…réduit toutes les questions que se posent les hommes  à la seule question : à quoi ça sert ?…à quoi ça me sert ? —elle postule que, à cette question, il peut être répondu scientifiquement, mathématiquement, en additionnant ou en soustrayant les plaisirs et les peines, l’utilité ou la désutilité, les avantages ou les coûts ; — elle suppose…qu’il existe un lieu de la certitude, où se dénouent tous les calculs et se résolvent toutes les équations… »

L’écologie à Annecy

Annecy est un modèle de contradictions. En matière de circulation, on y a mis la charrue bien avant de domestiquer les bœufs. En privilégiant égoïstement le centre ville on a repoussé à la périphérie tous les problèmes d’engorgement, d’embouteillages, de pollution atmosphérique et sonore. Les élus ont appliqué sans aucun discernement des solutions inventées pour d’autres contextes urbains. On regarde ce qui se fait ailleurs au lieu de partir d’une analyse locale et d’inventer soi-même les solutions adaptées. Le résultat est une juxtaposition d’approximations plaquées sur une réalité méconnue.

Convivialité ?

L’ensemble du mouvement culturel né à Annecy au lendemain de la seconde guerre mondiale était né d’apports humains venus d’ailleurs. C’étaient ces instructeurs nationaux dont Gabriel Monnet fut un exemple. Ils surent associer le peuple et la culture au point que, même méconnue aujourd’hui, c’est leur action qui a permis le rayonnement culturel d’Annecy. Ils étaient dans le droit chemin de la convivialité maladroitement remplacée désormais par des tentatives de vivre ensemble ou de faire société.

L’essentiel et le superfétatoire

Contradictions

Le rapport commandité par la ville d’Annecy et livré en 2017 aux élus de la ville pointait ce manque de convivialité, d’un nous qui permettrait d’avancer harmonieusement en matière de culture, d’écologie et dans tous les domaines. Mais on préfère s’en remettre, par exemple, à la société Biltoki pour développer les futures halles gourmandes du haras. L’après-confinement, la venue massive de nouveaux habitants créent une ville hors sol, incapable de s’inventer. On transplante à Annecy un plan de circulation en pétales qui n’est pas maîtrisé : une élue rencontrée au printemps 2024, pourtant en charge du projet, était incapable d’en parler car elle n’en comprenait pas le fonctionnement et les conséquences ! Cette absence de maîtrise  conduit à l’affrontement d’une volonté écologique et d’un surtourisme incontrôlable désastreux en matière d’écologie.

 Cluny et le Clunisois

Le marché de Cluny

Le Monde titrait le 13 août Dans le Clunisois, la transition à pas feutrés. C’est que le Clunisois est terre d’Histoire et d’agriculture. On vient bien voir l’Abbaye de Cluny mais l’événementiel et le surtourisme ne sont pas de mise. Au marché de Cluny, le nombre des producteurs locaux est important, encore davantage dans les marchés de villages. Le maillage associatif nourrit tout le territoire en matière de solidarité, de culture, d’Histoire, de rencontres, d’art et d’artisanat. Maillage qui est à l’image de ces haies vives séparant les champs pour les relier en y hébergeant la vie. Ce que l’on appellerait aujourd’hui  la diversité biologique. Cette diversité, on la retrouve dans un art de vivre qui fuit le paraître, dans les rencontres à la librairie, au Pain sur la table  ou au marché… Une écologie sociale et humaine.

Hurigny

Du 21 au 25 août se tient à Hurigny le 13e festival organisé par LA MANUFACTURE  D’IDÉES. De quoi intéresser Talpa puisque « La manufacture d’idées » relèverait presque de l’oxymore. Des idées faites à la main, du sur mesure ! À voir. L’édito de cette année se coule dans un chemin d’expression surprenant car il emprunte des éléments de langage éculés : habiter la terre, vivre-ensemble, déplacements ou décentrements de pensée, d’autres imaginaires, impensés de l’écologie… » « Entre-soi et parisianisme » me disent quelques Clunisois avec lesquels j’évoque ce festival. À voir puisque Philippe Descola, Bruno Latour, Vinciane Despret y sont passés. Hurigny est tout proche de Cluny, à deux pas de la gare de TGV qui mène de Paris à Annecy. Au centre des écologies ?

Rappel

Rencontré  au Grand Bivouac d’Albertville, Jean-Louis Étienne y déclarait : «  L’écologie, c’est fun. »