Théorie du ruissellement culturel

Théorie du ruissellement culturel

11 août 2022 Non Par Paul Rassat

La théorie du ruissellement culturel relève de la perle…de rosée et de non sens. On affirme habituellement que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Le ruissellement, à la façon d’un saumon remonte le cours des rivières et de la logique. Ce sont donc les grandes rivières qui font les petits ruisseaux. On ne voit dans ce processus qu’une partie de la noria, celle qui déverse de haut en bas suivant les lois de la physique économique. Il est pratique pour certains d’oublier qu’il a d’abord fallu approvisionner les sommets d’où provient le fameux ruissellement. Et ainsi celui-ci a le mérite d’apparaître écologique, naturel. ( Photo © Fabrice Wittner).

Le ruissellement en bassin

Dans le domaine de la culture on arrose les grandes structures en espérant qu’elles irriguent les petites. Prenez l’exemple d’une Scène Nationale comme celle d’Annecy ou d’ailleurs. Aux subventions de l’État, de la région, du département, aux aides de la ville ajoutez environ 60 000 euros de Savoie Mont Blanc afin que la structure fasse ce qu’elle a à faire. Elle doit s’ouvrir aux différents publics, ce qui fait partie du cahier des charges initial. De même pour l’aide à la création. Concentrons, c’est plus facile à gérer et à évaluer. La théorie du ruissellement consiste à se mettre en capacité de faire en sorte que. Derrière, (comme on dit) advienne que pourra et les saumons grandissent dans des fermes aquacoles.

Gérons, gérons petit patapon…

Et c’est ainsi que la culture devient gestion. Y prime l’art de capter les subventions locales, nationales, européennes. L’art de ficeler des dossiers. De déposer des candidatures incertaines dont le véritable but est de fédérer autour et sous soi. Car il est parfois nécessaire de simplement occuper le terrain afin de rester à l’origine du ruissellement aux yeux des autres. L’événementiel y contribue grandement. Et puis on partage, on est ensemble, on vit une expérience, des émotions.

Traverser pour mieux occuper

Nathan Paulin est un grand athlète et artiste. Surtout suspendu au dessus du vide. Ces lignes ne le critiquent pas. Il est très demandé, du Mont Saint-Michel à Annecy. Il y a effectué La Grande Traversée du lac entre l’Impérial et le Pâquier. Autrefois le Pâquier était un pré à vaches. On y bronze aujourd’hui, ou bien on regarde passer les funambules en place des trains. Ah, la vie scénarisée ! Comment voulez-vous, après cela, traverser dans les clous?

Partage toujours, c’est viral !

Puisque, partagée, l’émotion s’intensifie partageons celle de la création. Au lieu de vibrer à chaque pas d’un funambule dont la vie tient à deux fils, celui qui le supporte et celui qui l’assure, vibrons pleinement. Sans retenue. Pourquoi ne pas suivre quelqu’un qui pense en direct ? La foule amassée suivrait la performance, comme celle de Nathan Paulin. Se cassera-t-il la figure ? Ici un trou de mémoire, là un préjugé, le risque d’une ellipse. Il perd un instant le fil de sa pensée ! Mais non, il atterrit sain et sauf sur l’autre rive de la réflexion. On a tremblé en buvant des bières, en pique-niquant. Quel exploit ! Partir d’un socle solide et parcourir l’incertitude d’un déséquilibre avec le risque de chuter dans le vide intellectuel avant de reprendre pied et neurone !

Projet, vision

On demandait à Gandhi : Que pensez-vous de la civilisation occidentale ? — Ce serait une excellente idée, répondit-il. Comme une véritable vision culturelle à Annecy. La municipalité y participerait pleinement. La nature ayant horreur du vide, les grenouilles de La Fontaine occupent le terrain. Et pourquoi pas si on les laisse faire.

Précisions

Outre La Grande Traversée de nombreux spectacles et animations ont été proposés le 19 juillet, dont le concert de Birds on a wire.